Dans des rêves très angoissants nous sommes au bord d’un précipice qui nous attire vers lui. Parfois, c’est la seule issue face à des personnages menaçants qui nous poursuivent. Dans ce type de rêve, nous sommes acculés, incapables de faire face à nos agresseurs comme nous sommes incapables de faire face à une réalité difficile. Le sens du rêve est simple : soit nous sautons, soit nous affrontons la réalité.

La fascination du vide, l’envie de sauter est révélatrice de pulsions suicidaires. La peur et le vertige ressentis sont les nécessaires barrières de protection face à ces pulsions.

Le gouffre est une représentation du néant, d’une angoisse existentielle. Ce vide vertigineux qui vient terrifier le rêveur est relatif à sa vie quotidienne qui manque de sens. Le gouffre symbolise un mode d’existence qui ne mène nulle part, une tendance régressive. Les entrailles de la terre sont un rappel morbide de celles de la mère qui pourrait vouloir ravaler sa progéniture.

Le gouffre symbolise une notion d’avidité, de manque, de désir insatiable. L’argent, la nourriture, rien ne peut le combler. Il absorbe et engloutit tout.

En cas chute dans un gouffre, comme une chute dans le vide, le rêve vient exprimer un grand vide affectif que ressent le rêveur, une mémoire ravivée au moment du rêve, en résonance avec l’absence du père.

Insatiété, angoisse, sentiment de vide existentiel, vide affectif.

Rêver que l’on tombe est une sensation très angoissante. C’est pourtant un rêve très commun, que chacun de nous a fait un jour et dont il peut se souvenir aisément. L’âge de prédilection pour ce type de rêves se situe dans l’enfance, époque où ils se produisent de façon répétitive. Ils peuvent resurgir plus tard, de façon ponctuelle ou encore par cycle.

L’impression que laissent ces rêves n’est guère plaisante, et pour cause : ils réveillent la personne en sursaut tant ils semblent réels, provocant une grande anxiété et une accélération cardiaque peu propice au rendormissement. C’est au moment de l’endormissement qu’ils se produisent dans la grande majorité des cas. Les rêves de chute sont toujours des rêves d’angoisse. Le réveil brutal et donc générateur d’anxiété – qui vient nous tirer de ce mauvais pas – en est un signe évident.

Le fait de tomber implique une action irréversible, qui échappe à la volonté du rêveur. Tomber, c’est manquer d’un support stable, d’une base solide que les parents n’ont pas su construire autour de nous.

Pourtant, ces rêves ne sont pas toujours négatifs, principalement quand ils ne réveillent pas le dormeur. Les expressions imagées qui utilisent le verbe tomber sont très nombreuses dans beaucoup de langues. Tomber enceinte en est un bon exemple, ou tomber amoureux. Dans ce type de rêves plus positifs, nous tombons en arrière ou sur le sol et non pas dans un trou ou dans le vide. Tomber est ici synonyme de fascination.

Nous tombons aussi quand nous avions placé notre confiance en certaines personnes jugées dignes de la recevoir et que nous sommes déçus. Nous tombons de haut, c’est une expression courante.

Mais cette sensation de tomber peut être vécue de différentes manières. On peut se réveiller avec terreur ou retomber sur ses pieds. Si nous rêvons que nous retombons bien sur nos pieds après une chute vertigineuse, nous sommes doués d’une vitalité exceptionnelle. Cette image montre notre adaptabilité et la puissante volonté qui nous permet de repartir malgré l’absence des autres, parents ou proches. Cette absence était soit une inefficacité, soit une démission.

La sensation du vide peut être ressentie très fortement pendant le moment du rêve. Outre le sentiment du vide affectif et existentiel ressenti par le rêveur, le vide exprime aussi un sentiment de solitude. Celui qui se retrouve face au vide, se retrouve face à sa solitude, à sa différence et à l’indifférence des autres. L’angoisse et le malaise sont identiques à ceux générés par le vide. L’individu se sent en danger face aux autres. Il s’expose chaque fois qu’il a affaire avec le monde.

L’image la plus fréquente est celle où le rêveur se retrouve sur une minuscule plate-forme face à un vide obscur qu’il devine plus qu’il ne le voit. Ce néant est celui des autres, ceux qui le regardent avec indifférence, sans amour. Cette non-existence des autres est en fait le sentiment de négation de la sienne.

Un enfant trop livré à lui-même, sans amour, ressent un grand vide intérieur qui le terrifie et qui l’isole des autres.

Les rêves de chute proprement dits, ceux qui tirent du sommeil, sont toujours des rêves négatifs qui placent le rêveur face à ses terreurs, une angoisse vécue au quotidien. Ces états d’angoisse sont très fréquents chez les enfants qui ressentent un vide affectif ou dont l’éducation ou la situation familiale ne leur donne pas assez de bases solides. Ces bases sont celles qui leur permettraient de sentir une structure rassurante autour d’eux. Au moment précis du passage de la veille au sommeil, la perception des choses inconscientes et refoulées se fait mieux et l’inconscient ressent plus fortement les impressions pénibles qu’il va devoir affronter durant la nuit. C’est ce vide ressenti au quotidien qui l’entraîne dans cette chute.

Une approche moins formelle explique ce phénomène par la séparation, au moment du sommeil, du corps astral et du corps physique. Le rêveur qui est doué de cette faculté de décorporation peut ainsi voyager par l’esprit. Mais une anxiété soudaine de cet état peut le rappeler brutalement dans son corps, trop vite, avec une réintégration pas très bien contrôlée, angoissante. Ces états sont plus fréquents chez les personnes malades dont l’esprit cherche à se détacher des sensations du corps fiévreux.

D’une manière générale, les rêves de chute évoquent le sentiment de tomber ou de retomber dans ses problèmes, de retrouver un malaise, la peur du vide.