E.V.E.R
Ecole Vivante d’Enseignement du Rêve
Formation à la mécanique du langage du rêve et à son interprétation
Rentrée le dimanche 22 septembre 2024 à 16h00
Formation annuelle sur 10 ateliers mensuels, le 3ème dimanche de chaque mois
1500€ l’année complète à chaque Niveau
Voir la programmation thématique de chaque atelier dans la formation intensive
Niveau 1 : première année, premier degré pour acquérir les fondements de l’interprétation du rêve
NIVEAU 2 : seconde année, second degré formation Onirothérapeutes
Calendrier annuel des ateliers mensuels : http://tristan-moir.fr/formation/#calendrier-et-thematiques
ou Stages de formation intensive : (800 € les 5 jours) : http://tristan-moir.fr/formation/#formation-intensive
Les ateliers mensuels de formation au langage du rêve ainsi que les ateliers de formation intensive sont ouverts aux thérapeutes, aux étudiants ainsi qu’aux amateurs éclairés.
Je m'inscris à la formation annuelle
La formation Niveau 1 s’accomplit sur une année complète en présentiel et débute en septembre, pour s’achever en juin/juillet. Elle permet d’acquérir les outils nécessaires à l’interprétation du rêve. La formule formation en distanciel se fait uniquement lors des stages de formation intensive.
La formation Niveau 1 s’achève avec la remise d’une attestation de suivi et de capacité 1er degré.
La formation NIVEAU 2 s’accomplit sur une deuxième année et permet d’obtenir la certification Onirothérapeute par le cumul des Niveaux 1 & 2, donc 2 années, avec l’examen de passage final. Il est possible de faire une année en présenciel et la seconde en distanciel/stage de formation intensive est vice versa.
Les ateliers de formation au langage du rêve sont ouverts aux thérapeutes, étudiants et amateurs, le troisième dimanche de chaque mois.
Chaque atelier dure 4 heures, de 16h00 à 20h00, avec une pause sucrée de 20 mn.
À chaque atelier, deux personnes proposent un de leurs rêves qu’elles soumettent à l’analyse collective des membres des ateliers durant 90 mn. Cette approche thérapeutique apporte une approche encore plus didactique.
Pour ceux qui ne pourraient être présents à leur atelier régulier mensuel, il est possible de rattraper la session lors d’un stage de formation intensive à la journée correspondant la thématique manquée.
Chaque mois, une nouvelle thématique est proposée avec un angle précis d’observation du rêve pour comprendre ses structures, sa mécanique et sa logique : comment fonctionne et se décode le langage du rêve ?
L’acquisition de cette méthode permet réellement d’entendre le rêve et de comprendre son contenu latent.
Pour les thérapeutes et les futurs thérapeutes, comme pour les interprètes éclairés, c’est un outil thérapeutique précieux, le rêve révélant les blocages, les névroses, les zones d’ombre, comme les aspects positifs e† authentiques de la personne, ceux que l’Inconscient exprime quand le Conscient les refoule.
L’approche générale est psychanalytique, nourrie par les perspectives freudiennes et jungiennes augmentée d’une dimension personnelle : l’observation spécifique de la structure du langage du rêve.
Dans cette approche moirienne, des aspects plus spirituels peuvent aussi apparaître dans la lecture du rêve, cette dimension étant intrinsèque à la psyché humaine.
Lors de chaque atelier, pour mieux assimiler et comprendre la théorie, nous travaillons de façon pratique sur deux rêves proposés par les participants des ateliers.
L’observation des rêves des personnes présentes permet de mieux intégrer les principes de la méthode. Ainsi, à chaque atelier, deux personnes proposent un de leurs rêves qu’elles soumettent à l’analyse collective des membres des ateliers durant 90 mn.
C’est l’aspect vivant de l’enseignement de l’école du rêve, la fonction didactique étant plus efficace et plus intelligible par la mise en évidence de la fonction analytique et thérapeutique intrinsèque à l’interprétation du rêve. La justesse de l’analyse et de l’interprétation est confirmée par le retour de la personne qui expose son rêve. Pour celle ou celui qui propose et soumet un rêve à l’analyse du groupe, l’effet thérapeutique est très intense. L’aspect thérapeutique est donc conjoint étroitement à l’aspect didactique pendant la formation.
Une synthèse sera produite ensuite par la personne dont le rêve a été analysé sous forme d’un compte rendu écrit, résumé cohérent de l’interprétation.
Ce travail reprendra de façon synthétique les éléments de la thématique du mois qui ont permis de développer l’analyse et l’interprétation du rêve.
Par exemple, pour le premier atelier, la synthèse fera ressortir les éléments de la syntaxe du langage du rêve. Il s’agit de produire une synthèse, donc un résumé de la méthode d’analyse vue ce jour-là, et une synthèse, c’est, par définition, court !
Vous pouvez, néanmoins, augmenter cette synthèse d’une analyse ou d’une interprétation de votre cru si vous en avez envie ; l’essentiel, c’est que la synthèse thématique soit produite.
LA SYNTHÈSE EST À RENDRE IMPÉRATIVEMENT DANS LA SEMAINE QUI SUIT L’ATELIER ! LA SYNTHÈSE SERVIRA À VALIDER VOTRE ANNÉE POUR L’ATTESTATION DE SUIVI ET DE CAPACITÉ. TOUT RETARD COMPROMETTRA VOTRE VALIDATION.
Le dernier atelier d’interprétation individuelle, en juin, sera le deuxième point de validation de votre attestation.
Le rendu rapide de la synthèse est nécessaire pour deux raisons ; quand vous produisez la synthèse à chaud, c’est beaucoup plus facile, fluide et clair ; la mémoire est vive. Ensuite, je supervise ces synthèses avant de les envoyer aux personnes présentes lors de l’atelier ; plus la synthèse m’est présentée tôt, plus je m’en souviens et mieux je peux estimer celle-ci pour produire un résumé de la session et de l’analyse du rêve.
Le règlement s’effectue au trimestre à raison de trois trimestres pour l’année de formation.
- 600 € le premier trimestre (4 ateliers mensuels)
- 450 € chacun des trimestres suivants (3 ateliers mensuels)
Pour les personnes qui voudraient seulement suivre un seul atelier pour une thématique précise, le coût est de 150€ la session.
Le premier règlement d’inscription s’effectue le 1er septembre.
Ateliers de Supervision
Les ateliers de supervision extraordinaires sont ouverts à toutes les personnes qui ont déjà été initiées à la formation E.V.E.R – elles peuvent venir s’y entraîner et réviser – ainsi qu’aux novices qui voudraient découvrir le fonctionnement des ateliers. Ce cadre permet aussi de superviser un rêve de patient. Ces ateliers sont aussi ouverts aux novices qui voudraient être initiés à l’interprétation des rêves et proposer leurs rêves à l’interprétation du groupes, à ceux qui sont déjà initiés. Dans ce cas, l’aspect thérapeutique produit est très important. La présence des novices permet aux personnes déjà formées de mettre en pratique leur savoir sous la supervision du formateur. Chaque personne présente soumets un rêve au groupe.
Ces ateliers se déroulent le dernier dimanche de chaque mois, de 16h00 à 20h00, et le coût est de 150€ l’après-midi par personne.
ATTENTION ! Ces ateliers ne sont tenus que s’il y a le quota de personnes pour la bonne dynamique du groupe, c’est-à-dire au moins 6 personnes.
Merci de laisser votre N° de téléphone pour que Tristan puisse vous joindre et vous tenir informés.
Je m'inscris au prochain atelier extraordinaire
Lors des ateliers extraordinaires, chaque personne présente un rêve et le soumet à l’écoute de l’ensemble du groupe pour que le rêve soit interprété et analysé collectivement pendant un peu plus de 30 mn. Ce travail se fait avec la supervision de l’enseignant et le bienfait de la synergie du groupe.
Chaque atelier dure 4 heures, de 16h00 à 20h00, avec une pause sucrée de 20 mn.
Ils ont lieu une fois par mois, le dernier dimanche du mois le plus souvent (voir les dates précises dans le calendrier), se déroulent en groupe restreint de 6 personnes maximum.
À qui s’adressent ces ateliers de Supervision ?
Thérapeutes
Pour les thérapeutes, il s’agit de superviser l’interprétation qu’il auraient déjà faite – toute ou partie – des rêves de leurs patients. Ces rêves exogènes sont soumis de même à l’analyse et l’interprétation du groupe avec le superviseur.
Étudiants
Pour les personnes qui ont déjà suivi la formation, il s’agit de venir réviser la méthode puisque, durant l’atelier, face aux rêves proposés par les participants, chaque angle de lecture sera souligné avec la mise en exergue de l’angle le plus approprié.
Personnes souhaitant analyser leur rêve
Il s’agit de s’initier au travail didactique sur le rêve, être immergé(e) parmi des « initiés » tout en profitant des aspects thérapeutiques inhérents à l’interprétation et à la densité du travail collectif. Il peut s’agir de personnes totalement candides, n’ayant jamais fait analyser leur rêve, ou de personnes qui ont déjà travaillé en cabinet sur leurs rêves pour se révéler devant le groupe, cette exposition étant très bénéfique.
Le tarif des ateliers extraordinaires est de 150€ la session.
Formation annuelle au Langage du Rêve et à son Interprétation
de 16h00 à 20h00, le troisième dimanche de chaque mois
– 600 € le premier trimestre (septembre, octobre, novembre , décembre)
– 450 € par trimestre suivant de 3 sessions chaque. 150 € à l’unité.
En cas d’impossibilité de venue à un des ateliers réguliers du cursus, il est possible de le rattraper en rejoignant les stages de formation intensive qui ont lieu une fois par trimestre sur la demi-journée consacrée à la thématique manquée.
Calendrier des thématiques de chaque atelier mensuel
Dimanche 22 septembre 2024
SYNTAXE DU RÊVE
L’écriture du rêve révélatrice de la structure psychique du rêveur.
Reconnaître le découpage du rêve dans son déroulement et sa syntaxe selon le modèle ternaire simple de la rédaction scolaire ou de la dissertation.
Dimanche 20 octobre 2024
SÉMANTIQUE DU RÊVE
Linguistique du rêve : Champ lexical, occurrences, image-clef, & parataxe
Dimanche 17 novembre 2024
SYMBOLES DU RÊVE
Reconnaissance des symboles, personnels, universels ou culturels.
Dimanche 15 décembre 2024
PERSONNAGES DU RÊVE
Comment interpréter les figures de nos rêves, tous les personnages qu’il anime et ceux qui l’animent ?
Anima & animus, l’ombre.
Dimanche 15 janvier 2025
LES ÉTATS ÉMOTIONNELS DU RÊVE – 1
Investigation du rêve à la recherche des preuves des assertions de celui-ci.
Dimanche 16 février 2025
LES ÉTATS ÉMOTIONNELS DU RÊVE – 2
Dimanche 16 mars 2025
LES GLISSEMENTS SÉMANTIQUES DANS LE RÊVE (langue des oiseaux)
Travail sur les jeux de mots porteurs de sens dans l’interprétation du rêve.
Dimanche 13 avril 2025
LE RÊVE À L’ATTENTION DU GROUPE
Portée du message du rêve pour ceux qui l’entendent et l’interprètent. Repérage de la figure du thérapeute dans les rêves et sens de cette représentation.
Dimanche 18 mai 2025
HERMÉNEUTIQUE DU RÊVE
Travail sur les rêves avec l’apport de la culture de l’interprète, culture générale et celle acquise pendant la formation avec l’apport intuitif de chacun.
Dimanche 15 juin 2025
ÉVALUATION FINALE
Interprétation en solo pour chaque participant et révision des thématiques
ATELIERS EXTRAORDINAIRES
Atelier de SUPERVISION et de révision pour les personnes déjà formées au langage du rêve, thérapeutiques pour les novices :
Le dernier dimanche de chaque mois : 150 € l’après-midi
Descriptif des ateliers extraordinaires
En raison des vacances scolaires ou jours fériés, certains ateliers sont parfois déplacés d’une semaine. Vérifiez leur date.
Me contacter au 06 10 80 44 40 pour toutes demandes de RENSEIGNEMENTS et pour toutes participations aux ateliers extraordinaires.
Je m'inscris à la formation annuelleSyntaxe & mécanique du rêve
Niveau 1 : Observation méthodique et théorique de la structure du rêve.
Découpe narrative, Localisation, Temporalisation & Identification (où, quand et qui ?)
NIVEAU 2 : Observation de la construction psychique du rêveur au travers de la construction du rêve.
Ateliers Extraordinaires
Ouverts à tous dimanche 29 Sept.Réservez votre place
Pas d'atelier extraordinaire prévu
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Vous devez être inscrit(e) à la Formation anuelle pour réserver. Si vous ne l'êtes pas, inscrivez-vous maintenant.
Le tarif est de 150 € que vous pourrez payer sur place par chèque ou en liquide.
Sémantique & langage du rêve
Niveau 1 : Grammaire du rêve – Repérage de l’image-clef, Liens du champ lexical et Occurrences
NIVEAU 2 : Dépistage des liens logiques/émotionnels au travers des images et mots du langage du rêve.
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Le tarif est de 150 € que vous pourrez payer sur place par chèque ou en liquide.
Les symboles du rêve
Niveau 1 : Vocabulaire du rêve – Distinction entre les symboles universels et les symboles personnels du rêve (Inconscient collectif et Inconscient personnel). Reconnaissance précise des symboles, Induction de la méthode associative (freudienne) et de la méthode analogique (moirienne).
NIVEAU 2 : Exploration de la relation Conscient/Inconscient au travers de la mise en image symbolique. Mécanisme de construction des images symboliques. Définition et compréhension du Grand Inconscient.
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Reconnaissance des personnages du rêve
Niveau 1 : Comment interpréter les personnages du rêve, réels ou imaginaires, et les figures de substitution. Reconnaissance des composantes féminines et masculines de la psyché, Anima & Animus.
NIVEAU 2 : Exploration des mécanismes projectifs et des amalgames psychiques quant aux représentations des autres.
Définitions et focalisation sur les composantes et représentations féminines/masculines de la psyché, l’anima & l’animus.
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Distinction des les états réels des états émotionnels du rêve (I)
Niveau 1 : Investigation concrète du rêve – Recherche des preuves quant aux affirmations du rêve et dépistage des présomptions du rêveur.
NIVEAU 2 : Mise en évidence des thèmes vus précédemment et de la concrétisation de ceux-ci au travers des rêves. Constat de la subjectivité psychique génératrice de névroses, croyances, addictions, schémas d’échec, angoisses invalidantes, somatisations. Observation des schémas toxiques.
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Distinction des états réels des états émotionnels du rêve (II)
Niveau 1 : Exploration émotionnelle du rêve – Croyances – Parataxes.
NIVEAU 2 : Suite de l'approche du mois précédent.
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Le tarif est de 150 € que vous pourrez payer sur place par chèque ou en liquide.
Etymologie du rêve : Glissements sémantiques
Niveau 1 : La langue des oiseaux, la gaie science.
Les jeux de mots dans les rêves : glissements sémantiques, calembours, holorimes, homophonies & paronymies.
NIVEAU 2 : Observation des mécanismes de l’appareil psychique : Ça/Moi/Surmoi. Tabous et transgressions, contraintes et liberté. Cadre laxiste ou autoritariste : leurs méfaits.
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Le rêve à l'attention du groupe ou du thérapeute
Niveau 1 : Comment le rêve peut-il être altruiste, porteur de messages pour les auditeurs du rêve ?
Comment interpréter la figure du thérapeute dans les rêves ?
NIVEAU 2 : Observation de l’évolution des personnes qui travaillent avec leurs rêves, intégration et acquisition des messages du rêve. Évolution personnelle, altruisme onirique. Connexion à l’autre et augmentation du champ de conscience.
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Herméneutique
L'orientation et les pistes de lecture du rêve (réflexion & intuition)
Comment interpréter un rêve spontanément, de façon analogique et intuitive, avec ses acquis culturels (société, éducation, croyances), théoriques (enseignement et pratiques du sujet) du phénomène ?
NIVEAU 2 : Evolution du thérapeute, métabolisation psychique des connaissances, capacité au diagnostic intuitif (par acquisition de savoir et accumulation d’expériences), spontanéité et confiance en soi. Légitimité.
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Le tarif est de 150 € que vous pourrez payer sur place par chèque ou en liquide.
L'interprétation directe du rêve
Séance d’interprétation en solo pour chaque participant avec l’acquis et la synthèse des ateliers précédents.
Lors de ce dernier module, chacun interprète en solo du rêve d’un de ses coreligionnaires par tirage au sort. Chacun apportera donc un rêve, le plus court possible, pour le proposer et le soumettre à la sagacité de son interprète aléatoire. En principe, il y a 20 à 30 mn par personne.
NIVEAU 2 : Mise en application spontanée des approches précédentes et principalement de l’herméneutique dans cette séance d'interprétation individuelle.
Cette épreuve pouvant être assez longue, l'après-midi risque de se poursuivre un peu plus tard.
Réservez votre place à l'atelier
Vous devez être inscrit(e) à la Formation anuelle pour réserver. Si vous ne l'êtes pas, inscrivez-vous maintenant.
Le tarif est de 150 € que vous pourrez payer sur place par chèque ou en liquide.
Ecole Vivante d’Enseignement du Rêve
Stages de formation intensive au langage du rêve
Initiation au langage du rêve, à sa mécanique et à l’interprétation psychanalytique des rêves
Ateliers didactiques et thérapeutiques
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à venir : Mini-stages en VISIOCONFÉRENCE sur 2 jours, soit :
Plateforme Zoom – 320€ pour les 2 jours
Horaires : de 10h00 à 17h30
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PROCHAINS STAGES à Paris-Montparnasse sur 5 jours
en PRÉSENTIEL à Paris-Montparnasse
du lundi 21 au vendredi 26 octobre 2024
en DISTANCIEL via la plateforme Zoom
du lundi 28 octobre au vendredi 1 novembre
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Voir les prochaines dates de stages 2025 en bas le la page
Les ateliers commencent à 10h00 pour se clore à 17h30
Déjeuner de 12h15 à 13h45
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Stages sur 5 jours consécutifs Niveau 1 ou NIVEAU 2 :
en PRÉSENTIEL ou en VISIOCONFÉRENCE
Ateliers ouverts aux thérapeutes, étudiants ou amateurs (13 personnes maximum)
Tarif : 800€ pour les 5 jours de chaque niveau
Inscriptions ouvertes : tristan-moir@gmail.fr ou 06 10 80 44 40
Pour les ateliers en présentiel :
Hébergement à votre charge (nombreux hôtel, Airbnb et autres à Montparnasse ou banlieue sud très proche).
Repas dans les nombreux restaurants de Montparnasse (en abondance en face du lieu du stage) au coût moyen de 17€ le repas.
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Niveau 1 : Lors de ces formations accélérées, nous abordons de façon intensive tous les angles de lecture du rêve et étudions la méthode pratique pour intégrer les structures fondamentales du langage du rêve, règles nécessaires à son interprétation. Ce stage permet d’acquérir un outil solide, logique, sérieux et efficace pour comprendre et maîtriser l’interprétation du rêve dans une perspective thérapeutique.
La dimension thérapeutique est aussi très forte lors de ces stages pour chacun ; l’interprétation produite sur les rêves proposés par les participants est très révélatrice et parlante, pour le rêveur lui-même et pour les écoutants. Chacun peut se retrouver dans les problématiques révélées par l’interprétation du rêve ou comprendre les schémas psychologiques qui sont mis en évidence de façon psychanalytique, et traités de façon thérapeutique.
L’interprétation du rêve par la connaissance de son langage est un outil très utile à la connaissance de soi et au bien-être. Cet outil vient augmenter efficacement la palette du thérapeute.
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Pour le NIVEAU 2, il s’agit de reprendre le cursus pour les personnes ayant déjà suivi la formation complète ou un stage de formation intensive Niveau 1. Cette deuxième année de formation permet d’accéder à la fonction d’Onirothérapeute. Lors de cette seconde session, nous revisitons tous les aspects déjà vus lors du Niveau 1 pour les maîtriser parfaitement. Tout en reprenant le plan des thématiques proposés en Niveau 1, nous travaillons de façon plus poussée sur les liens psychanalytiques et thérapeutiques révélés par l’interprétation du rêve grâce à l’observation de son langage. À chaque stage, nous travaillons sur des rêves différents qui permettent d’observer et de comprendre des schémas psycho différents ; chaque stage est enrichissant.
La lecture scrupuleuse du langage du rêve met en évidence les grands schémas négatifs mentaux reproductifs (échec, sabordage, instabilité d’humeur, névroses, blocages, angoisses, somatisation, malaise, obsessions, dépendance affective, hypersensibilité invalidante, victimisation, liens pervers et/ou toxiques, loyauté familiale). Nous observons ainsi tous ces mécanismes dans leur mise en scène onirique tout en observant parfois certains troubles psychopathologiques légers.
Nous travaillons aussi sur les bienfaits de l’interprétation du rêve (mon credo : le telos, la finalité) qui fait briller la différence, permet la revalorisation, le narcissisation, l’estime et la confiance en soi ainsi que l’exploration de nos potentiels grâce au nettoyage psychique. Dans cette approche plus poussée, nous développons davantage les concepts d’anima & animus (ma pierre angulaire) ainsi que leur nécessaire harmonisation, pour entrer véritablement dans le processus d’individuation et d’éveil à soi-même avec l’augmentation de notre champ de conscience pour mieux prendre notre place dans et avec le monde.
Nous observons aussi l’évolution personnelle de chacun au vu des nouveaux rêves.
Tableau : anima & animus, indispensable, dans mon dernier livre :
MIEUX SE CONNAÎTRE GRÂCE À SES RÊVES
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Programme du stage Niveau 1 & NIVEAU 2
1er jour : matin de 10h00 à 12h15 :
SYNTAXE & MÉCANIQUE DU RÊVE :
Niveau 1 : Observation méthodique et théorique de la construction syntaxique du rêve. Découpe narrative, Localisation, Temporalisation & Identification (où, quand et qui ?)
NIVEAU 2 : Observation de la construction psychique du rêveur au travers de la construction du rêve.
– Après-midi de 13h45 à 17h30 :
SÉMANTIQUE & LANGAGE DU RÊVE :
Niveau 1 : Observation méthodique et théorique de la construction syntaxique du rêve – Repérage de l’image-clef, Liens du champ lexical et Occurrences
NIVEAU 2 : Dépistage des liens logiques/émotionnels au travers des images et mots du langage du rêve.
– 2ème jour : matin de 10h00 à 12h15 :
LES SYMBOLES DU RÊVE :
Niveau 1 : Vocabulaire du rêve – Distinction entre les symboles universels et les symboles personnels du rêve (Inconscient collectif et Inconscient personnel). Reconnaissance précise des symboles, Induction de la méthode associative (freudienne) et de la méthode analogique (moirienne).
NIVEAU 2 : Exploration de la relation Conscient/Inconscient au travers de la mise en image symbolique. Mécanisme de construction des images symboliques. Définition et compréhension du Grand Inconscient.
– Après-midi de 13h45 à 17h30 :
RECONNAISSANCE DES PERSONNAGES DU RÊVE :
Niveau 1 : Comment interpréter les personnages du rêve, réels ou imaginaires, et les figures de substitution. Reconnaissance des composantes féminines et masculines de la psyché, Anima & Animus.
NIVEAU 2 : Exploration des mécanismes projectifs et des amalgames psychiques quant aux représentations des autres. Définitions et focalisation sur les composantes et représentations féminines/masculines de la psyché, l’anima & l’animus.
– 3ème jour : matin de 10h00 à 12h15 :
DISTINCTION ENTRE LES ÉTATS RÉELS ET LES ÉTATS ÉMOTIONNELS DU RÊVE : (I)
Niveau 1 : Investigation concrète du rêve – Recherche des preuves quant aux affirmations du rêve et dépistage des présomptions du rêveur.
NIVEAU 2 : Mise en évidence des thèmes vus précédemment et de la concrétisation de ceux-ci au travers des rêves. Constat de la subjectivité psychique génératrice de névroses, croyances, addictions, schémas d’échec, angoisses invalidantes, somatisations. Observation des schémas toxiques.
– Après-midi de 13h45 à 17h30 :
DISTINCTION ENTRE LES ÉTATS RÉELS ET LES ÉTATS ÉMOTIONNELS DU RÊVE : (II)
Niveau 1 : Exploration émotionnelle du rêve – Croyances – Parataxes.
NIVEAU 2 : Suite de la matinée.
– 4ème jour : matin de 10h00 à 12h15 :
ÉTYMOLOGIE DU RÊVE : La langue des oiseaux, la gaie science.
Niveau 1 : Les jeux de mots dans les rêves : glissements sémantiques, calembours, holorimes, homophonies & paronymies.
NIVEAU 2 : Observation des mécanismes de l’appareil psychique : Ça/Moi/Surmoi. Tabous et transgressions, contraintes et liberté. Cadre laxiste ou autoritariste, leurs méfaits.
– Après-midi de 13h45 à 17h30 :
LE RÊVE COLLECTIF & LE RÊVE À L’ATTENTION DU THÉRAPEUTE :
Niveau 1 : Comment le rêve peut-il être porteur de messages pour les auditeurs du rêve ? Comment interpréter la figure du thérapeute dans les rêves ?
NIVEAU 2 : Observation de l’évolution des personnes qui travaillent avec leurs rêves, intégration et acquisition des messages du rêve. Évolution personnelle, altruisme onirique. Connexion à l’autre et augmentation du champ de conscience.
– 5ème jour : matin de 10h00 à 12h15 :
HERMÉNEUTIQUE :
Niveau 1 : L’orientation et les pistes de lecture du rêve (réflexion & intuition). Comment interpréter le rêve avec son acquis culturel et son intuition au travers des angles de lecture étudiés pendant l’atelier.
NIVEAU 2 : Evolution du thérapeute, métabolisation psychique des connaissances, capacité au diagnostic intuitif (par acquisition de savoir et accumulation d’expériences), spontanéité et confiance en soi. Légitimité.
– Après-midi de 13h45 à 17h30 :
L’INTERPRÉTATION DIRECTE DU RÊVE :
Séance d’interprétation en solo pour chaque participant avec l’acquis et la synthèse des ateliers précédents. Cette épreuve valide la formation et permet de délivrer l’attestation de suivi et de capacités.
Lors de ce dernier module, chacun fera l’interprétation en solo du rêve d’un de ses coreligionnaires par tirage au sort. Chacun apportera donc un rêve, le plus court possible, pour le proposer et le soumettre à la sagacité de son interprète aléatoire. En principe, il y a 20 à 30 mn par personne. Cette épreuve pouvant être assez longue, l’après-midi du vendredi risque de se poursuivre un peu plus tard avec aussi, la remise des attestations et le pot de clôture.
NIVEAU 2 : Mise en application spontanée des approches précédentes et principalement de l’herméneutique
Méthode
Lors de chaque atelier, nous travaillons sur un rêve proposé par un des participants, pour allier pratique et théorie. Ce rêve servira de support à la thématique proposée lors de la session du moment, une thématique mensuelle : une approche différente de l’interprétation des rêves à chaque atelier. Les ateliers offrent ainsi un aspect thérapeutique pour ceux qui soumettent leur rêve et, bien souvent, pour les participants/écoutants/interprètes. Cette pratique est importante puisque l’aspect thérapeutique produit et bien visible a un impact évident sur la mémorisation et la compréhension de la méthode. Nous travaillons le rêve dans sa forme orale, mais aussi dans sa forme écrite, les rêves proposés étant imprimés. Dans le cadre des ateliers, des rêves types qui ne sont pas produits par les participants peuvent être aussi proposés .
A la fin du stage, après l’évaluation finale d’interprétation en solo, il est délivré :
une « Attestation de suivi et de capacités à la formation au langage du rêve » pour les Niveaux 1
et une « Attestation de capacités au titre d’onirothérapeute » pour les NIVEAUX 2.
Pour mieux suivre la formation, la méthode est parfaitement détaillée dans mon livre :
« L’INTERPRÉTATION PSYCHANALYTIQUE DES RÊVES ».
CONTACTER TRISTAN POUR S’INSCRIRE
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CALENDRIER
Dates des stages de l’année 2024 / 2025
Formation intensive au langage du rêve
Sur 5 jours consécutifs à Paris Montparnasse
En présentiel ou en visioconférence via Zoom
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Dates des prochains stages :
Prochains Stages
Exemple d’analyse-interprétation d’un rêve par la connaissance
du langage du rêve dans le cadre des ateliers E.V.E.R
Observation d’un rêve de synchronicité au travers de la découpe syntaxique, de l’entrée des personnages, des occurrences & du champ lexical, ainsi que par l’observation de la figure du thérapeute dans le rêve.
Atelier du rêve du 28/06/2014
Rêve de Louise du 25 juin 2014
L’araignée prise de tête ou Je m’en vais
Je vais dans la cuisine de mon appartement et j’allume la lumière, mais les coins sont flous et la lumière est bizarre. Je m’en vais car c’est très bizarre.
Plus tard mon fils de 6 ans vient dans la chambre et me dit que, dans la cuisine, il y a une araignée géante et qu’il a peur d’y aller.
Je me dis que c’est bizarre que je ne l’aie pas vue, mais que cela explique pourquoi les coins étaient flous. J’y vais pour la voir.
Effectivement, il y a une araignée géante ! J’ai peur et je pars dans la chambre de mon fils pour être avec lui. Je lui dis de ne pas s’inquiéter, que papa va tout arranger. Et quand son père rentre du travail, il fait effectivement partir l’araignée.
Ensuite, je me trouve dans une pièce qui est une annexe d’une maison comme un garage. Il y fait sombre et il n’y a presque pas de lumière. Les murs sont bleus/verts (turquoise) comme la couleur de la cuisine.
Dans cette pièce, je me retrouve avec Tristan et une femme d’une cinquantaine d’années. J’interprète mon rêve avec l’araignée et je dis que cela représente la mère castratrice. Tristan est d’accord alors que cette femme dit que non, que ceci est uniquement l’interprétation première, mais que, comme c’est elle qui a écrit le dictionnaire à la base, elle sait mieux que Tristan ce que cela veut dire et qu’elle n’est pas d’accord car il faut voir plus loin que cela. Tristan soutient sa propre théorie et elle la sienne ; ils n’arrivent pas à se mettre d’accord. Je m’en vais car je trouve cette discussion un peu lourde.
Je sors à l’extérieur de la maison et j’ai un rendez-vous avec O. mon premier petit ami important ; il doit venir et je l’attends devant la maison. Je vois qu’il y a de la neige à l’extérieur, mais il ne neige pas. Je me dis que cela ressemble étrangement à la maison où j’ai habité avec mon père et que, dans mon rêve, je mélange les deux mondes.
O. est en retard et cela m’ennuie de l’attendre ; je n’ai pas envie de rester là à l’attendre ; il n’avait qu’à être à l’heure donc, je m’en vais !
Analyse du rêve de synchronicité de Louise au travers de la découpe syntaxique, de l’entrée des personnages, des occurrences & du champ lexical, ainsi que par l’observation de la figure du thérapeute dans le rêve
EXPOSITION NARRATIVE 1 (Acte 1, scène 1, Entrée de l’héroïne) : Je vais dans la cuisine de mon appartement et j’allume la lumière, mais les coins sont flous et la lumière est bizarre (1).
Le rêve s’ouvre par une détermination de la rêveuse, son allant : elle fait son entrée et va dans la cuisine, le lieu des transformations et de l’alchimie intérieure. C’est une exposition claire et précise où elle entre en scène. De surcroît, Louise est bien déterminée à faire la lumière sur ses fonctionnements intérieurs et à séparer sa part à elle (son appartement) du monde informel et peut-être, d’un complexe familial. Nous voyons tout de suite qu’un processus d’introspection psychanalytique est à l’œuvre par cette première phrase, une volonté de prise de conscience.
Si l’action affirmée répond bien au désir de « l’introspectrice », le constat qui en découle est surprenant : les coins sont flous. Qu’est-ce que cela peut vouloir dire ? Tout d’abord, qu’ils ne sont pas nets. Il y a donc une mise au point qui est délicate, une difficulté à bien voir clair dans sa construction interne quand elle s’éloigne des grandes lignes ; elles ne se rejoignent pas. Les formes construites et les contenants étant en rapport avec la personnalité du père, nous pouvons tout de suite en déduire que la forme du père a été déficiente sur certains points de finitions, même si les grandes lignes sont là. Avait-il une propension à arrondir les angles et à ne pas s’affirmer suffisamment ? Ensuite la lumière elle-même (la conscience), qui appartient symboliquement à la dimension masculine, est bizarre. Il y aurait un autre déficit du père ; il n’a pas suffisamment éclairé sa fille et peut-être était-il bizarre lui-même.
Si nous prenons la formule au pied de la lettre, comment une lumière peut-elle être bizarre ? Il semblerait, dans le cas présent, qu’elle n’aille pas jusqu’au fond des choses et des recoins de la rêveuse, qu’elle puisse s’arrêter juste avant le coin, le point de jonction qui permettrait de résoudre la quadrature du cercle. Il peut s’agir d’une figure de style ; ce n’est pas la lumière qui est bizarre, mais ce qui est éclairé et révélé ou pressenti. Ouais, c’est bizarre et il va nous falloir garder ça au coin de l’œil.
RÉSOLUTION 1 (Acte 1, scène 2) : Je m’en vais car c’est très bizarre (2).
Si ça ne lui en bouche pas un coin, Louise est quand même perturbée et préfère décamper à la recherche d’un coin plus tranquille. Trop de bizarre et c’est le bazar ! Commencent ici des allées et venues où notre rêveuse va entrer et sortir de la scène à maintes reprises, venir, s’en aller, partir et revenir : Je vais x 2 – Je m’en vais x 3 – Papa va – Il doit venir – Je pars – partir – Je sors – Ils n’arrivent pas.
Ces occurrences des entrées et sorties de la scène sont importantes et symptomatiques, comme nous allons le voir au fil de l’interprétation.
CONTRE-EXPOSITION (Acte 2, scène 1 – 2ème entrée) : Plus tard mon fils de 6 ans vientdans la chambre et me dit que, dans la cuisine, il y a une araignée géante et qu’il a peur d’y aller.
Nous supposons que c’est la chambre de la rêveuse qui est évoquée, celle où la rejoint son fils apeuré. En effet, on le serait à moins : une araignée géante, c’est horrible ! Quelle drôle de cuisine ! Il s’y passe des choses bien étranges… A quelle sauce allons-nous être mangés ?
La chambre où le fils entre en scène pourrait être la dimension intime de Louise, son imaginaire d’enfant de 6 ans où elle se réfugie, un monde moins bizarre que celui des adultes. Dans cette dimension, la mère et le fils sont en connexion, écoute et compréhension, mais la cuisine pourrait être un monde qui est encore flou dans les encoignures, ce qui veut dire pas très clair pour Louise. Est-ce le monde des adultes ?
Réflexion : Je me dis que c’est bizarre (3) que je ne l’aie pas vue, mais que cela explique pourquoi les coins étaient flous.
« Bizarre, bizarre, bizarre, Louise a dit trois fois bizarre, comme c’est bizarre[1] »… Sachant que ce qui est prononcé trois fois se réalise, nous pouvons surenchérir : « A force d’écrire des choses bizarres, les choses bizarres finissent par arriver[2] »… Alors, là, nous ne pouvons plus douter ; un drôle de drame s’est joué ou va se jouer dans cette cuisine, quelque chose de flou en relation avec le symbole de l’araignée. Il est possible que le drame soit encore rayonnant en Louise et perceptible par son petit garçon sensible. L’image de l’araignée est-elle latente quand la mère est avec le fils ; est-ce une facette floue de Louise ?
Ce qui est bien visible, c’est que Louise ne met pas du tout en cause la parole de son fils ; elle l’entend, en bonne mère. Elle trouve quand même bizarre qu’elle n’ait pas vue la bestiole, mais soupçonne alors une explication au floutage des coins, ce qui lui permettra peut-être de joindre les deux bouts plus tard et de démonter l’horreur annoncée, la matérialisation de l’araignée géante.
RÉSOLUTION de la Contre-exposition (Acte 2, scène 2) : J’y vais pour la voir.
Prenant véritablement son courage à deux mains pour surmonter sa peur du bizarre, décoincée et bien décidée à protéger son fils, notre mère courage retourne sur ses pas et VA dans la cuisine pour LA voir. Elle veut maintenant en avoir le cœur net et, surtout, voir de quoi il retourne. L’introspectrice veut faire véritablement la lumière sur son cas et sur ce qui se tapit dans l’ombre sans se voiler la face. Le fait d’affronter ses peurs en regardant en face ce qui nous effraye est toujours une action positive en rêve, signe d’une volonté de comprendre ses mécanismes inconscients. Résolument, Louise s’approche de la révélation.
EXPOSITION 2 (Acte 3, scène 1 – 3ème entrée et pas des moindres) : Effectivement, il y a une araignée géante !
Enfin la voici, la star incontournable, le mythe terrifique, la déesse de la nuit, l’étoile de nos rêves et cauchemars, le fantasme absolu, la sublime, la seule, l’unique, la prestigieuse et illustrissime araignée ! Nous voici en présence de la figure la plus récurrente et la plus obsédante des rêves de l’humanité ! Inclinons-nous devant sa magnificence, cette figure ambiguë et velue qui cherche autant les coins d’ombres que les feux des projecteurs, la modeste histrionique dont les rôles sur nos écrans oniriques ne sont que rarement à la mesure de sa “mygalomanie”. Voilà ce que Louise ne pouvait pas voir et aussi le pourquoi : il y a eu une censure du Surmoi, à la Street View, par floutage des recoins. Ah, quand l’art est nié…
Approchez, approchez, Mesdames et Messieurs ! Venez frissonner devant la reine épeire ; qui plus est, elle est géante ! Alors, nous voilà projetés maintenant dans un vrai film d’épouvante, une série B fantastique et domestique ; la cuisine est l’antre d’un avatar dégénéré d’Arachné. Le fiston avait raison : quelle abomination !
Sachant que tous les protagonistes du rêve sont des figures de substitution, quoi ou qui représente-t-elle ? Est-ce une déclinaison de la rêveuse, sa face cachée ? Nous pourrions le penser, puisque son apparition est liée au fils et qu’elle officie dans la cuisine, lieu plutôt dédié à la mère. Si nous partons du postulat que, dans une pièce, une personne peut jouer deux rôles différents en changeant de costume dans un savant chassé-croisé, celle-ci ne peut pas apparaître sous deux formes différentes au même moment et au même endroit ; ce n’est donc pas Louise qui joue le rôle de l’araignée, à moins que ce ne soit son reflet et qu’il y ait un miroir psychanalytique, une psyché dans la pièce, le petit coin, le cabinet du thérapeute.
C’est une piste, mais l’attitude de Louise s’éloigne de cette forme, l’araignée représentant la mère négative, la mère étouffante ou dévorante, la mère possessive et manipulatrice qui veut emmailloter sa progéniture dans un cocon d’amour ou de culpabilité pour la garder et se nourrir de son amour. À aucun moment dans le rêve, Louise ne fait montre de possessivité, ni de manipulation envers son garçon ; elle est même très à l’écoute. Si c’est un reflet d’elle, il est minime et donc loin de l’araignée géante. De quelle mère s’agit-il alors ? C’est ce que nous allons essayer de découvrir dans la suite de notre enquête fébrile et arachnéenne en suivant le fil de Soi. Allons nous faire une toile !
Nous sommes tous confrontés à cette figure de l’araignée puisqu’elle est intrinsèque à la nature de la mère, cependant, cette dimension archaïque est variable selon les personnes et les moments. Il est évident que la majorité des mères savent juguler cet aspect et que l’intelligence du cœur empêche cette propension toxique. De plus, la conscience vient contrecarrer l’inclination pour cette face sombre maternelle. Nonobstant, l’araignée doit sa popularité à celles qui se laissent dominer par la pulsion arachnéenne primitive, celles qui tissent leur toile engluante inlassablement, aveuglément.
NARRATION 2 (Acte 3, scène 2) : J’ai peur et je pars dans la chambre de mon fils pour être avec lui. Je lui dis de ne pas s’inquiéter, que papa va tout arranger.
Si elle a surmonté sa peur pour constater la véracité des dires de sa progéniture, Louise n’en mène pas large et préfère prendre une nouvelle fois la poudre d’escampette. Décidément, notre maman préfère la chambre d’enfant et n’aime pas faire la cuisine. Elle n’y retournera pas puisque la reine y est.
Louise se réfugie dans la chambre de son fils… pour se protéger ou pour le protéger ? La phrase est ambiguë ; elle indique une régression de la rêveuse qui cherche du secours auprès de son garçon avec lequel elle fusionne. Néamoins, c’est une mère aussi qui a écouté son fils, a vérifié ses dires et qui le rassure par sa présence. La seconde phrase ne laisse plus planer de doute ; elle sait trouver les mots pour réconforter l’enfant : papa est fort ; il va tout arranger dès son retour. C’est aussi à elle-même qu’elle se parle, sans doute pour se rasséréner ; elle se trouve confrontée à ses terreurs enfantines et une partie d’elle est en attente de la présence positive du père.
RÉSOLUTION 2 (Acte 3, scène 3, entrée/évocation du père) : Et quand son père rentredu travail, il fait effectivement partir l’araignée.
Chose promise, chose due ! Maman n’a pas menti ; papa est fort ; il a réussi à chasser le monstre, tout du moins, nous le ou la croyons sur parole, puisque nous n’assistons pas à la scène. Néanmoins, nous ne reverrons plus l’araignée gênante. Partie, volatilisée… Bravo ! Nous apprenons du même coup que papa travaille, qu’il assume toutes ses fonctions, capable de chasser les monstres après une dure journée de labeur. Voilà qui est encore plus rassurant et idyllique ! Chacun est à sa place traditionnelle, le père assume son rôle de pierre angulaire. Quelle belle résolution ! Tout est bien qui fini bien. Pourvu que ça dure…
Nous pouvons voir dans cette séquence une donnée fondamentale quant à la présence de l’araignée. Cette dernière ne peut se mettre à régner que si le père ne prend pas sa place. S’il est trop absent physiquement ou moralement, démissionnaire ou infantile, la mère est angoissée par trop de devoirs ou de tâches, des responsabilités qui l’obligent à être partout, à s’inquiéter pour l’enfant, à trop fusionner avec lui ou à trop le contrôler. Son amour engluant, sa possessivité, son angoisse, sa mauvaise humeur ou sa tyrannie ne peut s’exprimer que s’il y a déficit de l’époux et de son rôle de père de l’enfant. C’est d’autant plus vrai si la propension araignée est surdéveloppée chez certaines mères, par prédisposition naturelle ou par parentalisation précoce.
Cette configuration du père déficitaire qui favorise la mère araignée est consternante de banalité actuellement, tellement les pères ne savent pas prendre leur place, n’ont pas envie de se battre quand leur épouse les excentre et qu’ils les laissent ou les encouragent à devenir des angoissées contrôlantes, des monstres (control freak en anglais). Ce cas de figure n’est pas exclusif à notre époque, mais il peut s’accentuer aujourd’hui, surtout quand le père se maternise, qu’il ne sait plus très bien quelle est sa place et qu’il tend à se substituer à la mère. Dans ce cas, le père peut devenir araignée lui aussi et entrer en compétition avec son épouse[3].
EXPOSITION 3 (Acte 4, scène 1 – 4ème & 5ème entrées) : Ensuite, je me trouve dans une pièce qui est une annexe d’une maison comme un garage. Il y fait sombre et il n’y a presque pas de lumière. Les murs sont bleus/verts (turquoise) comme la couleur de la cuisine. Dans cette pièce, je me retrouve avec Tristan et une femme d’une cinquantaine d’années.
Après avoir éclairé sa cuisine interne, Louise nous invite à explorer davantage ses tréfonds, lieux qui semblent prendre l’apparence d’un garage. Cependant, si nous nous fions à la couleur dudit garage, malgré le manque de lumière, il est probable que nous n’ayons pas quitté la cuisine et que nous soyons dans une couche plus profonde et plus sombre de l’Inconscient de la rêveuse, les recoins. Il y a toujours unité de bleu, donc unité de lieu. Cette annexe semble cependant avoir déjà été explorée en cabinet puisque nous y trouvons son thérapeute, votre serviteur en l’occurrence. Louise m’anime dans le théâtre intime de son prisme psychique turquoise. De plus, elle me prête une collègue ou une compagne d’une cinquantaine d’années. Cette dernière pourrait être mon double féminin ou une déclinaison de la mère. La configuration est freudienne à souhait puisque Louise reforme le triangle œdipien ; le trio incluant un couple adulte avec le rêveur représente très souvent ce triangle. La présence du thérapeute confirme le triangle œdipien ; la plupart des patients font un transfert positif sur cette figure, projetant l’image du père idéal, celui qui écoute, comprend et propose un cadre. Après l’enfant, Louise fait entrer les parents sur scène avec le thérapeute/père, la quinquagénaire/mère. Louise peut rejouer alors sa place d’enfant et sa relation dans le cadre parental, la triangulation.
La syntaxe de la phrase qui fait entrer les deux substituts parentaux confirme que ce travail d’introspection est plutôt fructueux, puisque Louise « se retrouve », elle-même avec Tristan. En second plan, la cinquantenaire peut évoquer une autre psy qu’aurait consultée Louise. Sa représentation et son identification ne sont pas nettes. L’image du père-substitut est plus claire et identifiée ; cela nous incline à penser que Louise valide cette forme contemporaine, qu’elle lui donne plus de valeur lui ayant permis de se retrouver.
Ainsi, la lumière commence à se faire, lentement, à l’intérieur d’elle, sur sa nature intrinsèque et sur ses représentations parentales. C’est sans doute pour mieux s’en séparer, prenant conscience d’elle-même. Bien que très faible dans ce passage du rêve, la couleur est très positive, le turquoise étant un mélange du vert de la mer (inconscient) et du bleu du ciel (conscient). Il y a beaucoup de propositions symboliques, toujours très positives, qui sont liées à cette couleur, donc, nous ne garderons que celle d’une teinte spirituelle qui commence à poindre. Elle s’oppose, par sa valence positive à la présence de l’araignée. Louise entrevoit une réunion harmonieuse du masculin et du féminin, un futur qui chante ; le bleu lumineux, c’est aussi la conscience.
La transformation de la cuisine en garage-annexe est curieuse. Un glissement sémantique nous invite à y voir une mise en garde contre le passage du temps et la sénescence : gare (à l’) âge !
NARRATION 3 (Acte 4, scène 2) : J’interprète mon rêve avec l’araignée et je dis que cela représente la mère castratrice.
Oh, oh ! Notre rêveuse est une experte en interprétation (c’est normal ; elle a suivi la formation E.V.E.R), tout autant qu’elle a un recul extraordinaire ; elle peut interpréter la section précédente du rêve dans la continuité. Nous sommes bien entrés dans une couche plus profonde du rêve puisque Louise est capable de se distancier, tout en rêvant, de la première couche du rêve et de l’analyser. Face à son panthéon onirique, elle reconnaît un avatar de Kali, la déesse courroucée, la mère mortifère et castratrice. Pour Louise, cette verbalisation est une affirmation de soi ; elle est capable d’exprimer une pensée personnelle face aux imagos parentales. Nous pouvons noter que Louise a écrit qu’elle interprète son rêve avec l’araignée et non pas son rêve d’araignée, ce qui veut donc dire qu’elle peut confondre la femme présente avec l’araignée.
Conséquence de l’affirmation de la NARRATION 3 : Tristan est d’accord alors que cette femme dit que non, que ceci est uniquement l’interprétation première, mais que, comme c’est elle qui a écrit le dictionnaire à la base, elle sait mieux que Tristan ce que cela veut dire et qu’elle n’est pas d’accord car il faut voir plus loin que cela. Tristan soutient sa propre théorie et elle la sienne ; ils n’arrivent pas à se mettre d’accord.
Le père-thérapeute valide l’expression de sa fille et permet, par cette reconnaissance, la narcissisation de l’enfant, processus nécessaire à la confiance en soi. Si c’est un écho de la transmission de ce même père, il est judicieusement utilisé et compris. En revanche, la femme-mère est revêche et s’oppose à l’affirmation de sa fille ; même si elle argumente ensuite, son NON est castrateur. Alors, voilà démonstration brillamment mise en scène de Ce Qu’il Fallait Démontrer : la mère, par son veto, ne reconnaît pas l’expression de la pensée de sa fille, pensée qui révèle et dénonce l’action castratrice maternelle, celle de la dimension de l’araignée (avec l’araignée). Par son opposition, la mère péremptoire inféode sa fille pour garder sa place de première dame et l’empêcher de la dépasser, processus semi-conscient. Si Louise ne la juge pas, la femme se sent certainement attaquée dans son rôle de mère. Il va s’en suivre une affirmation hallucinante de sa part : c’est elle qui aurait écrit la base de mon dictionnaire des symboles oniriques ! Ou je suis totalement inconscient ou elle ne manque pas de toupet !
Nous pourrions considérer que la femme représente mon intuition, ma partie féminine inspirante ou mon anima, mais l’antagonisme mis en scène évoquerait un conflit intérieur, or celui-ci ne permettrait pas la gestation dudit dictionnaire, les deux pôles n’étant pas en harmonie. La querelle mise en scène correspondrait plus alors au conflit interne de la rêveuse entre son anima et son animus, une pollution atavique de ses parents et un transfert négatif. Cette pollution, encore active, la bloquerait dans son évolution, la dépense d’énergie inhérente au conflit amoindrissant son potentiel.
Mais revenons à l’affirmation gonflée. Ainsi donc, la contradictrice prétend être à la base de mon travail… Si nous observons les éléments symboliques, la base, c’est la terre, le substrat, le fondement, le féminin, la chair, la matrice dont chacun est issu. Dans ce sens, je suis bien né ici-bas, d’une mère qui m’a transmis la vie, un héritage biologique et génétique. Elle m’a donné aussi son amour. Dans le cas présent, la cinquantenaire revendique cette maternité, de corps et d’esprit, envers l’enfant. Elle s’approprie tout ce que peut développer sa progéniture et aussi ses projets ; elle en est la base. Dans l’hubris de la matriarche, elle s’approprie ainsi tout ce qui vient du mâle, celui qui n’enfante pas, même s’il a déjà procréé lui aussi ; il n’est que son prolongement. Elle le castre. C’est elle la matière première, la chair originelle, rôle qui lui est dénié dans la Genèse ; Eve serait issue de la côte d’Adam[4]. Cette usurpation de procréation peut être à l’origine de la première frustration historico/hystérique, ce que Freud nomme le complexe de castration chez la femme, générateur d’un désir de revanche.
L’homme, symboliquement, c’est le haut, le ciel, l’intellect. Il est amené à devoir s’échapper de l’attraction terrestre, celle de la mère, pour pouvoir ensemencer une autre terre. Cette semence peut être intellectuelle aussi, or dans les deux cas, l’homme doit toujours garder ses racines, son féminin intérieur pour être en équilibre. Pour cela, il doit être capable de séparer la mère possessive du féminin, rejeter l’emprise maternelle, mais respecter et aimer cette énergie féminine qui l’anime et le pousse à créer.
Cette hypothèse pourrait expliquer le désaccord des deux représentants parentaux mis en scène ici, la revendication de l’usurpatrice et son outrecuidance. Elle invite pourtant à voir plus loin, à ne pas oublier que c’est elle la base, l’énergie primordiale qui anime tout. Cette invitation pourrait stimuler l’intelligence de sa fille, mais comme elle n’explique pas vraiment ni ne donne de piste, cela ressemble plus alors à de l’embrouillage ; elle laisse entendre qu’elle est à l’origine de tout, qu’elle a tout compris et que sa fille n’est pas très intelligente si elle ne comprend pas. C’est le fameux : « Vous voyez ce que je veux dire… » Hé bien non ! Nous ne voyons pas du tout ce qu’elle veut dire. Les sous-entendus sont toujours malsains, confusionnants, à l’origine des désordres émotionnels, de l’impertinence des sentiments et de la corruption d’une pensée claire.
Nous pouvons imaginer cependant une orientation confuse et une invitation à la toute-puissance : « Vois plus loin que le bout de ton nez, ma fille, pense à ton avenir. Le seul avenir possible pour une femme, c’est que tu deviennes comme moi (une araignée) et que tu entres dans le matriarcat ; approprie-toi le travail de l’homme si tu ne veux pas qu’il te dépossède comme tous ceux de son genre ; c’est toi qui l’a créé. Rappelle-lui toujours d’où il vient. »
Devant l’incohérence du propos et l’appropriation de son travail – un vol intellectuel – le substitut paternel ne l’entend pas de cette oreille ; il tombe ainsi dans le piège de l’araignée et se laisse alors manipuler puisqu’il entre dans la controverse. C’est la stratégie du conflit, la culture de ceux qui n’en ont pas, la manipulation instituée par la femme jalouse des prérogatives masculines, celle qui veut castrer puisqu’elle souffre elle-même d’un complexe de castration, tradition perpétuée et acte perpétré par des siècles de culture et par sa propre mère (toutes les femmes ne souffrent pas de ce complexe, heureusement).
La phrase mensongère et ambiguë réussit à engluer l’homme dans la toile qu’elle vient de lui tendre. C’est le lien qu’elle veut instituer encore avec lui, pouvant lui reprocher de s’éloigner, d’avoir mille autres centres d’intérêt qu’elle, dont sa fille dont il serait trop proche. Les reproches dans un couple sont les pires des tue-l’amour, responsables d’un effet pervers : ils engluent dans la culpabilité celui qui les subit tout en l’éloignant des sentiments du cœur. La culpabilité et la colère se substituent alors au sentiment amoureux positif pour créer un couple dysfonctionnel, conflictuel et… fusionnel quand même. Quand on ne sait plus s’aimer, on peut se détester, s’entredéchirer et se faire souffrir pour maintenir le lien. Cette configuration est la cause de tous les conflits sempiternels et le conflit créé l’attachement.
RÉSOLUTION 3 (Acte 4, scène 3) : Je m’en vais car je trouve cette discussion un peu lourde.
Opération marâtre réussie : en stimulant le couple conflictuel, la femme refusionne avec le mari et sépare le père de la fille. Blanche-Neige, alias Louise, se retire ainsi du triangle et ne fera pas son Œdipe. Elle s’en va une nouvelle fois et abandonne sa place. Après le transfert positif, le thérapeute perd sa place idéalisée ; l’Inconscient de Louise est submergé par l’image résiduelle du père abandonnique et génère le transfert négatif, contrepoint fréquent après l’idéalisation. Ce transfert négatif peut être seulement ponctuel, très circonstanciel, et le « transférant » peut passer d’un pôle à l’autre parfois. Parfois, le transfert négatif s’installe définitivement et le thérapeute est alors diabolisé. Cette phase est favorable à la conservation des névroses, dans la mécanique de résistance psychologique. La plupart du temps, dans les cas les plus lourds, c’est l’attachement à la souffrance qui favorise cette contre phase, un attachement proportionnel à la souffrance vécue.
Ha oui ! Nous sommes d’accord avec elle ; c’est lourd d’avoir deux parents abandonniques, tout autant qu’ils sont écrasants pour leur enfant. Lassée d’arrondir les angles et fuyant l’atmosphère pesante, elle les laisse à leurs hypothèses masturbatoires et à leur polémique entre la théorie de l’évolution et la théorie du complot. Ils ne pourront tomber d’accord. La forme du couple conflictuel va alors s’engrammer dans l’Inconscient de la fille pouvant lui faire rejouer ce schéma dans sa ou ses futures relations.
Les retrouvailles de Louise avec son mari, père aussi de son enfant, n’ont été que de courte durée. Les schémas mortifères parentaux sont venus se superposer à la quiétude du foyer qu’elle avait réussi à créer. La pollution mentale la pousse à la nomadisation affective et l’empêche de pérenniser la forme attendue et magnifiée du couple avec enfant, de s’accomplir dans le cadre familial sédentaire.
Une nouvelle fois, nous constatons l’échec de la relation homme/femme qui se mute en lutte de pouvoir. Si nous revenons aux valences symboliques des pôles masculin et féminin, ces deux aspects sont opposés, mais complémentaires. Si l’homme ne doit pas se couper de son féminin intérieur pour ne pas se dessécher et perdre ainsi l’usage du langage et de la créativité, la femme doit préserver son masculin intérieur pour se réaliser de façon concrète dans le monde, être capable d’agir et de mettre en forme tout ce que sa nature féminine pressent. Elle doit nourrir ce pôle masculin et ne pas se substituer à lui, sous peine de concurrence et de dysharmonie. Cette tendance à la substitution à l’homme est le symptôme d’une castration que subit la femme depuis des générations, une incapacité et un interdit de communier avec son pôle masculin intérieur. Cela induit une dépendance-colère aussi à l’homme, tradition perpétuée par… le matriarcat. Nous venons de voir comment la mère-araignée a induit un mécanisme acquis de séparation d’avec l’homme.
Or, les épousailles des opposés, ne sont pas seulement issues d’un fantasme, mais bien d’une réalité inscrite en nous, une forme idéelle à atteindre. La couleur de la cuisine, lieu du mélange des énergies et de la transmutation, nous confirme la possibilité de cette harmonie entre le féminin et le masculin, le vert de la mer et le bleu du ciel. La couleur turquoise, éminemment positive, est le symbole de cette fusion intérieure, de la gnose réalisée en nous, de l’amour inconditionnel de l’autre, ce même amour que chaque parent a pour ses enfants, s’il n’y a pas trop de névroses installées.
EXPOSITION 4 (Acte 5, scène 1 – 6ème entrée en évocation) : Je sors à l’extérieur de la maison et j’ai un rendez-vous avec O. mon premier petit ami important ; il doit venir et je l’attends devant la maison.
Louise est hors d’elle et hors du temps. Elle se remémore ses attentes, ses désirs de vie. Elle se retrouve à l’époque de son premier grand amour, O. Il est possible qu’il symbolise l’Opposé, le masculin extérieur fantasmé, le substitut du père démissionnaire ou celui qui été éloigné d’elle, celui qui pourrait lui permettre d’atteindre la plénitude du cercle amoureux, le « Ooooooh, c’est bon »… C’est un phénomène psychologique connu, une déclinaison de la dépendance affective (l’attente de celui qui doit venir, une sorte de Messie) engendrée par la carence de l’Opposé. Ce mécanisme induit une idéalisation et une exacerbation du désir sexuel face au vide hystérique. Or qui dit idéalisation, dit déception assurée après l’Osmose, la phase lune de miel (période de fusion harmonieuse ou passionnelle, d’appétence et de sexualité débridée) ; l’autre ne sera jamais à la hauteur de ses attentes. Ooh, c’est déjà fini…
Cette histoire d’O qu’a vécue autrefois Louise pouvait être l’espoir pour elle d’écrire un nouvel Opus avec le petit ami, de former un couple la menant à son épanouissement de femme, puis de mère, pour réparer le triangle Originel qui n’avait pas fonctionné.
- pourrait être aussi Oreste, le matricide, celui qui est capable de tuer sa mère castratrice, Clytemnestre, celle qui a comploté et a fomenté le trépas de son époux, Agamemnon, avec son amant, le funeste médecin Egisthe.
Il est possible que cette scène primitive de la fuite de la maison familiale et du rendez-vous avec le premier garçon aimé ait été vécue comme la grande libération. Cet épisode aurait marqué fortement le psychisme de Louise, la faisant fantasmer et idéaliser ce moment particulier : le Oui de la reconnaissance mutuelle, de l’acceptation par l’autre, le sentiment d’avoir enfin une place, ce qui aurait pu aussi la pousser à rejouer ce moment dans sa vie : sortir du cadre familial pour retrouver l’être aimé, l’amant extérieur et rejouer les premiers moments de la fusion Orgasmique. Le mouvement des allées et venues serait celui-ci : Louise sort une deuxième fois de la scène pour attendre celui qui doit venir. Elle est en posture d’attente. Or, l’attente, c’est l’enfer – surtout pour un enfant qui souffre d’abandonnisme –, c’est revivre le vide glacial de l’absence à soi.
Constat : Je vois qu’il y a de la neige à l’extérieur, mais il ne neige pas.
S’il y a de la neige alentour, c’est qu’il a neigé ; élémentaire mon cher Watson ! Le blanc est la couleur de l’absence. Il y a donc eu une période glaciaire, un grand manque d’amour dans la vie de notre infortunée rêveuse, la petite marchande d’allumettes. A force d’être exclue de la relation au père et exposée au NON de la mère, la petite fille n’a jamais eu vraiment de place auprès des deux parents et souffre encore de cette exclusion, de la froidure de l’absence d’amour. Pourtant, si elle ne peut s’empêcher de quitter son foyer, celui qu’elle a créé, dans l’attente d’une nouvelle histoire d’O, elle sait aussi qu’elle va revivre la froidure de l’exclusion dans le monde extérieur.
La construction de la phrase peut nous intriguer. Elle induit un état advenu autrefois et qui ne serait pas encore dégelé, mais Louise ne produit plus de froid, ni n’en reçoit. C’est donc plutôt bon signe. Néanmoins, il pourrait y avoir une menace qui plane encore, le risque de retomber dans le schéma et d’abandonner sa place : laisse tomber la neige.
Réflexion 4,1 : Je me dis que cela ressemble étrangement à la maison où j’ai habité avec mon père et que dans mon rêve, je mélange les deux mondes.
Nous y voilà ! Effectivement, c’est bien ça : la rejouance de l’abandon et la confusion entre les deux époques. Si le père est bien identifié, la douleur liée à son inaccessibilité est aussi bien dépeinte. C’est la déréliction. Tout se mélange émotionnellement et il n’y a là rien d’étrange. A un autre niveau, nous avons la confirmation que la rêveuse a la capacité d’explorer les couches du rêve, comme les couches de son histoire, ces deux mondes parallèles[5]. Louise a atteint un niveau de conscience très important par l’introspection psychanalytique. Elle est capable de voir qu’un schéma de séparation est à l’œuvre dans sa vie actuelle, schéma primitif qui est la rejouance du conflit parental. Celui-ci la pousse à répéter le désaccord du couple.
Inconsciemment, Louise a reproduit le schéma d’abandon et d’arrachement, le déracinement. Nous supposons par cette réflexion : « où j’ai habité avec mon père », qu’il y a eu séparation de ses parents dysfonctionnels (ouf !) et qu’il y a eu cohabitation avec le père, un déplacement, donc un éloignement de la mère ; cette dernière est absente de la scène. La froidure mise en scène amène cette question : l’anathème jeté par la mère araignée a-t-il interdit le lien entre le père et la fille alors qu’ils ont vécu en proximité ? Nous n’aurons pas la réponse directe dans ce rêve, mais nous pouvons la déduire ensuite.
Constat / Réflexion 4,2 (Acte 5, scène 2) : O. est en retard et cela m’ennuie de l’attendre ; je n’ai pas envie de rester là à l’attendre ; il n’avait qu’à être à l’heure…
Cet anathème est puissant puisqu’il semble qu’il ait interdit le lien avec l’homme attendu. Effectivement, l’homme espéré n’arrive pas, n’est pas arrivé. Tout se mélange, mais Louise opère ici une prise de conscience ; elle ne veut plus s’ennuyer, être absente à elle-même en étant dans l’attente de l’autre, l’homme extérieur, le supposé sauveur. Elle se reconnecte avec son désir, lassée d’être dépendante de celui de l’homme. La pièce ne s’est pas jouée ? Tant pis, il n’avait qu’à être à l’heure, arriver quand c’était le moment. Oreste… Non, je pars. Maintenant, qu’il aille se faire voir ! Il n’avait qu’à être haleur de bateau ivre, là où fermentent les rousseurs amères de l’amour !
RÉSOLUTION 4 (Acte 5, scène finale) : …donc, je m’en vais !
Pour la troisième fois, Louise quitte la scène. Elle s’en va, lassée des sanglots longs qui ont blessé son cœur d’une langueur monotone. Louise est-elle prisonnière de ce schéma de fuite qui la fait sortir de toutes les structures ? Est-elle condamnée à rejouer éternellement ce scénario d’abandon, à errer au vent mauvais, à s’attacher à des hommes lointains ou inaccessibles et à les attendre[6] ?
Non, cette troisième affirmation la mène à l’éveil puisqu’elle se réveille. C’est la fin des va-et-vient et de l’incertitude. Nous pouvons supposer une prise de conscience magistrale, un véritable désir de sortir de ce schéma. La neige est tombée, il n’est pas venu ce soir, mais il n’y aura pas de désespoir ; Louise n’attend plus de l’autre, mais bien d’elle-même. Dans cette scène finale, une troisième et dernière fois, elle est venue nous dire : « je m’en vais ». Elle tire le rideau, définitivement, fait ses adieux à jamais sur son passé confusionnel.
Si Louise se retrouve seule à la fin du rêve, c’est qu’elle n’est plus dépendante de personne ; n’oublions pas qu’elle a validé la figure du père de son fils. Cela veut donc dire qu’elle préfère maintenant la relation réelle et la jouissance à la relation de frustration. Elle n’attend plus le fantôme de celui qui l’a quittée, préférant la réalité (son conjoint et son fils) à l’embrouillage. Elle sort de la dépendance affective et de la raie niée.
Observation du rêve dans son contexte de synchronicité[7]
Nous allons aborder maintenant le contexte singulier de ce rêve, celui de la synchronicité, une concordance bizarre de deux éléments similaires qui n’ont aucun lien entre eux.
Voici ce contexte :
Le 25 juin 2014 une émission consacrée au rêve a été diffusée sur une grande radio où était interviewée une neurologue qui fait des statistiques sur le rêve dans le cadre de son travail et qui a publié un livre sur ce sujet.
J’avais été contacté auparavant par une journaliste de cette radio pour faire une intervention sur le langage du rêve dans le cadre de cette émission, intervention préenregistrée et incrustée dans l’émission au cours de sa diffusion.
Dans le dernier quart de l’émission, mon intervention est diffusée (durée 3’30”). Dans celle-ci, on m’interroge sur l’articulation du langage du rêve et sur le symbolisme de l’araignée, comme exemple ; je développe et parle de l’image de la mère possessive ou abusive. Après mon propos, l’animatrice interroge l’invitée sur la présence de ce symbole dans les rêves, sa récurrence et comment elle l’interprète. La spécialiste confirme que l’araignée est assez présente dans les rêves et qu’il y a des « bébêtes » (sic) dans les rêves (4%), mais qu’elle ne les interprète pas. Elle dit qu’il y a aussi des grosses bêtes, terrorisantes chez ceux qui ont des terreurs nocturnes, et des petites bêtes, mais que ces bêtes représentent ce qu’elles sont. Bizarrement, le ton devient soudain un peu sarcastique, puis méprisant et elle ajoute (avec un rire de gorge forcé, façon poule en train de pondre) : « Par contre, on n’interprète pas du tout ça d’un point de vue symbolique : une araignée, c’est une araignée, point ! En science on n’est pas dans une surinterprétation des faits. La personne dit qu’elle a vu une araignée, ce n’est pas quelqu’un d’autre (entendre : l’araignée ne représente pas une autre personne). » Je suis de plus en plus consterné et réalise alors qu’il n’y a pas que dans les rêves qu’il y a des bêtes, sur les ondes radiophoniques aussi, il y a de grosses bébêtes.
Voilà le contexte ! Le rêve de Louise a été fait dans la nuit qui a suivi la diffusion de l’émission, du 25 au 26 juin 2014, sans qu’elle ait écouté l’émission. Louise m’a raconté son rêve ensuite, en cabinet, le 30. Ce fut une séance de résolution. Nous l’avons ensuite analysé en atelier.
Etonnante synchronicité, non ! Et drôle aussi.
Pourquoi ?
La question qui se pose maintenant, c’est celle du pourquoi. Comment se fait-il qu’il puisse y avoir une coïncidence de propos, de personnage et de temps entre le rêve de Louise et le contenu de l’émission ? C’est bizarre, non ? Si trop de bizarre ne vous effraie pas ni ne vous incite à vous en aller, observons maintenant ce phénomène que Jung nomme « Synchronicité ». Ces symétries et analogies surprenantes existent bien dans la vie réelle et plus encore dans les rêves. En ma qualité d’onirologue qui peut entendre des dizaines de rêves dans une semaine, j’observe des rêves faits par des personnes qui n’ont absolument aucun lien, rêves qui ont parfois la même structure, les mêmes images, la même histoire, le même contenu ou des détails dont la similarité est manifeste et troublante. Ce phénomène se produit par vagues. Je peux rester un an sans entendre de rêves de synchronicité, puis il y aura une occurrence de ce phénomène, d’autant plus que je peux être sensible à celui-ci, s’il met en scène des éléments de ma propre vie. Les rêveurs ne sauront rien de cette synchronicité onirique si je ne les informe pas de la coïncidence, ce que je fais rarement pour ne pas produire d’interférence, sauf si cela est vraiment signifiant pour le sujet. Comme je n’ai pas accès non plus à tous les rêves de la planète – heureusement – il est possible que des milliers de rêves contenant les mêmes informations se produisent simultanément dans tous les pays du monde, sans que nous puissions les recouper, ou que les synchronicités concernent seulement des zones du globe sensibles à des moments particuliers.
Alors, quant au pourquoi… le rêve se sert du matériel contemporain le plus signifiant. Il fonctionne par analogie quand l’Inconscient entre en résonance avec des événements contemporains de l’extérieur pour parler de notre monde endogène. C’est la raison pour laquelle le contenu manifeste du rêve emprunte des scènes ou des éléments de la veille qu’il déforme plus ou moins ou reproduit selon le sens qu’il tend à signifier par le contenu latent[8](principe de distorsion). Le matériel contemporain usité peut être seulement restreint à des faits privés ou bien ouvert à des événements plus collectifs. Il est possible que certains événements exogènes à notre histoire soient extrêmement rayonnants au moment de leur déroulement et puissent ainsi être captés pendant le temps du sommeil, parce qu’ils sont signifiants pour nous. Ce serait donc le cas pour Louise qui aurait perçu dans son rêve cette tension et le conflit d’écoles émis sur les ondes. C’est sans doute parce que cette problématique entre en résonance intensément avec son histoire et avec une réflexion relative à celle-ci au moment du rêve, celle de l’araignée symbolique, l’image de la mauvaise mère. Dans tous les cas de synchronicité, il y a un observateur ou un acteur qui envoie l’information, un émetteur. Une radio est un émetteur aux rayonnements puissants pouvant être relayés par des milliers d’auditeurs témoins. Il est possible que Louise ait reçu cette information par ce biais, inconsciemment. C’est l’explication la plus plausible, les concordances sont trop importantes pour qu’il ne s’agisse que d’un simple hasard.
La cuisine de l’extrême
La problématique de Louise, nous l’avons bien comprise, est celle de sa place de mère ainsi que de sa place de femme. C’est aussi son rapport avec sa propre mère et son opposition avec celle-ci (il est possible qu’il ne soit pas question uniquement de sa mère, mais de marâtre, des formes de substitution maternelle, de grand-mères, de tantes, de voisines, de femmes proches d’elle dans sa jeunesse qui ont voulu avoir une emprise sur elle, en faire leur objet. Ce lien peut être réactivé au présent par des figures analogiques actuelles. En effet, ces profils sont souvent présents dans le monde du travail et il n’est pas rare de se retrouver sous la volonté d’emprise, positive ou négative, d’une aînée ou d’une supérieure hiérarchique).
Ce rêve de synchronicité exprime une terreur ancienne de l’araignée – certainement revivifiée par un déclencheur analogique actuel – ainsi qu’une crainte de lui ressembler avec le temps, d’être mangée par cette forme de la mère contrôlante ou dévorante. Ce pourrait être une tentation aussi. Le glissement sémantique sur le mot garage suggère une mise en garde contre les méfaits du passage du temps, du renforcement des névroses avec la prise d’âge. L’araignée géante correspondrait à l’anticipation d’une métamorphose arthropodienne kafkaïenne. Louise a été contaminée et veut se débarrasser de cette emprise psychique, une drôle de cuisine interne. Quand elle se rend dans la cuisine, désireuse de faire la lumière sur son passé, elle se confronte aussi à un futur ténébreux possible, une vision prolepse ; la forme psychique atavique pourrait se superposer à sa forme humaine si elle n’y prenait garde. Ça fait peur… Ce devenir serait en opposition avec sa nature féminine profonde, son évolution, son désir de conscience et toute l’intelligence humaine qui l’anime.
Alors, pourquoi la cuisine ? Ce lieu n’est pas anodin ; la cuisine est le lieu de la transformation des matières primitives, de l’alchimie interne, de l’assimilation des nourritures psychiques et de la métabolisation. Dans ce travail alchimique, Louise doit se purifier, se débarrasser du vil – les pollutions maternelles – pour accomplir sa métamorphose et atteindre le subtil, afin de ne pas se transformer en araignée. Cette dernière perspective donnerait aussi le cafard.
Dans un autre glissement sémantique nous pouvons entendre Q.I. dans le mot cuisine. Q.I. zine : fan de gros quotients intellectuels ? C’est possible. L’amatrice de gros QI serait en recherche de formes similaires à la sienne. Cette nature intrinsèque se devine et se révèle en elle par sa capacité à entrer en métaposition dans son rêve, à l’analyser in situ et à se distancier encore quand les belligérants s’appesantissent, quand ils sont lourdingues, soudain privés de légèreté par le manque de discernement. Donc, si Louise, reconnaît les gros QI, c’est qu’elle en possède un aussi, CQFD ! La sobriété du rêve, sa narration synthétique et sa concision sont les marques d’un esprit affiné et certainement d’une surdouance. Cette singularité s’entend aussi par le sentiment d’isolement de la narratrice, sa marginalisation, la propension à toujours se retirer ou à se faire rejeter, symptômes dont souffrent beaucoup de surdoués. L’enfant surdoué se sent différent et incompris, ce qui est normal puisque les autres n’ont pas l’intelligence nécessaire pour comprendre celle qui les dépasse. De plus, le surdoué intellectuel est aussi un surdoué sensitif, quelqu’un qui souffre d’une trop grande sensibilité, un hypersensible ce qui le rend vulnérable, trop émotif et parfois inadapté au monde et à ses codes spécieux. Percevant trop d’informations externes, de stimuli toxiques ou d’émotions polluantes, il peut ainsi se refermer dans sa bulle et ressentir un état de déréalisation, se sentir déconnecté du monde. Les occurrences sur les allées et venues seraient relatives à la propension de la rêveuse à entrer et sortir de la réalité, cette même réalité qui a pu être difficile autrefois.
La mise en scène du rêve et la posture analytique de la rêveuse, ainsi que son désengagement, peuvent nous guider vers cette hypothèse de la surdouance, donc du sentiment d’incompréhension dont elle pourrait souffrir, l’induisant à se carapacer et à se carapater. C’est encore kafkaïen. La problématique de l’intelligence (Louise) confrontée aux pulsions primitives (l’araignée) pourrait être aussi pertinente dans cette perception synchronistique.
Le contenu latent
Revenons donc à l’émission influente et à son contenu. Pendant l’écoute de l’émission complète, la rediffusion du 26 juin, hormis une bonne culture générale sur les processus neurologiques du rêve et l’étude de sa manifestation, j’ai été frustré de ne pas en apprendre davantage. Si l’invitée connaît bien sa partie, elle semble peu avertie, ni curieuse de la profondeur du rêve et de ses mécanismes psychologiques ; elle ne montre pas de recul, ni de capacité d’analyse pour ce phénomène. Bon, chacun son métier et sa vision. Si nous nous référons au contenu latent des propos de la neurologue pendant l’émission, manifestement le rêve se trouve tronqué et réduit à l’expression de borborygmes neuronaux, d’échos résiduels aléatoires de la réalité ou de réflexes miroir. Le rêve n’aurait aucune perspective de sens et de représentation symbolique. C’est bête… Néanmoins, il est possible que ce point de vue et ces études apportent de nouvelles compréhensions et pénétrations du rêve. Sait-on jamais ? Attendons… Et puis, pourquoi ne pas catégoriser et comptabiliser[9] les occurrences oniriques, à l’instar du businessman du Petit Prince, l’homme sérieux qui n’a pas le temps de rêvasser et qui compte les étoiles pour les posséder ?
Face à la réaction de ladite neurologue, on peut tout de même s’interroger sur son ton sarcastique et sur sa posture défensive relative à mon intervention et à ma spécialité, le langage du rêve. S’est-elle sentie menacée ? Ça n’aurait aucun sens ; je ne suis pas en rivalité avec elle ; mon domaine est spécifique, comme le sien. Pourquoi chercher la petite bête et se réfugier derrière la sacro-sainte institution de la Science, cette discipline qui exclut tout ce qui ne peut se mesurer par la reproduction exacte d’un phénomène ? Moult quidams qui se réclament de la Science et se retranchent derrière leur titre de scientifiques ne sont pas forcément ses meilleurs serviteurs. Historiquement, nous pouvons déplorer que cette discipline ait compté dans ses rangs beaucoup de besogneux réactionnaires, voire d’obscurantistes, voulant préserver leur pré carré en s’opposant au génie des visionnaires. Aujourd’hui, certains scientifiques peuvent se réfugier aussi dans un rôle de fonctionnaires planqués, serviteurs obséquieux dans l’obédience de leurs pères, impétrants impénétrants qui méritent le label pantoufle.
Le point de vue du scientifique, comme tout point de vue, est temporel et historique, pouvant être influencé subjectivement par des opinions, des prérogatives et l’espoir de s’approprier un domaine en y apposant son nom. Nombres de vérités scientifiques d’aujourd’hui seront certainement remises en cause par les découvertes ou les divergences de points de vue de nos enfants, tout autant que les vérités scientifiques d’hier sont remises en causes pour beaucoup par les découvertes actuelles. Ceci est aussi valable dans des disciplines qui ne sont pas considérées comme des sciences exactes, comme la psychanalyse.
Si la science mesure, théorise et codifie en formule les phénomènes qu’elle observe pour en faire des lois, elle n’explique pas ces processus – le magnétisme par exemple (les aimants) – mais les décrit. La science dit comment, mais pas pourquoi. Surtout, s’il est nécessaire de connaître les lois, c’est pour mieux sortir d’elles. Un phénomène peut se reproduire et être mesuré en laboratoire, certes, tout comme une névrose[10] se reproduit selon le même schéma… dont il faut sortir. La recherche du pourquoi et du sens permet aux chercheurs de tout poil de faire de nouvelles découvertes, mais, pour ce faire, il est nécessaire d’avoir une ouverture d’esprit qui puisse admettre ce que la science n’admet pas encore, d’être un peu irrationnel parfois : philosophe, rêveur ou psychologue. Il faut aller chercher du côté de la physique quantique pour avoir des approches du pourquoi ; mais de ce côté, on induit une notion de subjectivité dans l’approche scientifique ; l’observateur d’un phénomène s’inclut lui-même comme donnée dans l’expérience qu’il observe puisqu’il influe sur l’expérience et la modifie par son observation. Plus précisément encore, selon l’orientation du chercheur, il va voir se manifester le résultat qui dépend du point de vue auquel il adhère.
L’araignée pourrait-elle être une émanation de l’observatrice ou une projection d’un tiers ?
Le contenu manifeste
La manifestation de l’araignée psychique est l’expression d’un sentiment d’imposture et d’impuissance que ressent au fond d’elle la femme devenue mère sans être devenue adulte. Pour celle qui apparaît comme une araignée, la cause serait une névrose installée très tôt, relative à sa place d’enfant, une affection la maintenant dans le sentiment de ne pas avoir été vue et entendue. Il en résulte un fond d’illégitimité et un sentiment d’injustice qui la poussent à sur-revendiquer son statut et sa place. Ainsi, à la moindre contrariété, la mère-douceur-et-sourires peut passer à une forme radicalement opposée. Mise en défaut, la mère araignée va alors vociférer et agonir, faisant montre d’une redoutable puissance de feu ou, au contraire, jouer les victimes éplorées, celle qu’on redoute de contrarier. De façon générale, elle cherche à se faire entendre et à occuper toutes les places en contrôlant tout et en imposant son désir par la toute-puissance infantile déguisée en matriarcat[11]. Cette dominance peut prendre différentes formes : amour tyrannique, sacrifice, victimisation, ingérence ou autoritarisme sévère. La mère araignée souffre aussi d’un complexe de castration qui se réactive dans certaines situations, notamment dans la compétition ou la substitution à l’homme ; elle devient alors une mère phallique. Il s’agit encore de la rejouance de sa propre enfance, d’avoir été éloignée du père ou d’avoir été défavorisée en tant qu’élément féminin, parfois face à un frère. Très souvent, il y a eu un manque d’accompagnement et de transmission, une grande frustration. Cet atavisme est fréquemment transmis par une lignée de matriarches, des femmes qui se sont retrouvées dans un paradoxe n’ayant pas eu le droit d’avoir de places tout en ayant été contraintes de se substituer à l’homme.
Manifestement, la mère araignée cherche à dominer et à manipuler son entourage par la forme tyrannique, embrouillante et culpabilisante, activant les structures d’assujettissement ou de culpabilité paralysante présentes au fond de nous. Nous avons tous, plus ou moins, des structures d’obédience introjectées et vouées à la matrice dont nous sommes issus. Celles-ci sont d’autant plus fortes que la mère qui se sent illégitime peut s’adresser à l’enfant durement et sans explication, donnant des ordres intransigeants et arbitraires qui viennent stimuler les structures d’accueil de la peur ou de la culpabilité. Or, cette expression accablante est celle d’un malaise intérieur et d’une inertie pesante chez cette forme de mère. La lourdeur et l’absence à soi-même induisent souvent une dépression. Le fond dépressif est latent chez la mère infantile, masqué par sa toute-puissance, mais contagieux quand même.
N’ayant pas développé son Moi, la mère araignée demeure un gros bébé dévorant qui manipule émotionnellement son entourage pour compenser sa frustration. Le Ça impose alors sa bête tyrannie, superfétatoire et aléatoire.
L’araigneurologue
Est-il possible que notre rêveuse connectée ait senti cette structure primitive psychique chez la femme qui rabaisse le psy, le substitut paternel de Louise ? Si c’est le cas, cette énergie conflictuelle serait entrée alors en résonance avec sa sensibilité, causant le réveil d’une affliction ancienne, celle de sa problématique d’enfance ; son lien avec sa mère-araignée. Hypersensible, elle aurait développée une réceptivité particulièrement vive à ce type de personnalité à l’intelligence différente et toxique pour elle. Malgré elle, Louise peut se connecter avec des éléments exogènes à sa sphère intime, mais résonants et signifiants pour elle. Le thérapeute représenté serait donc bien le substitut paternel, celui qui aurait été l’objet d’un transfert et le catalyseur d’affects anciens et intenses, révélant la mère nuisible.
Si nous revenons à notre invitée, il est bien évident qu’elle n’est pas cette forme caricaturale, que nous ne sommes pas en présence d’une neuneurologue et que l’aspect araignée n’est pas la partie dominante de sa personnalité. Cet aspect serait seulement saillant dans certaines situations, notamment si un intrus vient s’immiscer dans son domaine et lui gâcher son heure d’apothéose radiophonique en délivrant des balivernes sur les bébêtes oniriques, en assénant ses interprétations comme des vérités premières et en voulant transformer sa scène privée en bébête show. La grosse tête chercheuse a voulu rendre à l’araignée ses lettres de noblesse, ses étoiles et sa toile, son rang. Ainsi, en aucun cas nous ne pouvons penser qu’elle se serait sentie visée, ni reconnue…
Louise a l’ouïe sensible
Par le rêve, Louise fait se rencontrer et échanger les substituts parentaux dans un fantasme onirique et névrotique. Elle les met face à face, ici et maintenant – alors qu’ils ne se sont pas rencontrés physiquement, mais seulement chronologiquement et spatialement par la magie des ondes – pour leur faire rejouer le conflit mortifère de ses parents qui l’a évincée. Pas d’escarmouche, ni question de prendre la mouche (pour nourrir l’araignée) ! Nous n’entrerons pas dans cette polémique ni dans cette discussion un peu lourde pour rester au diapason détaché de notre héroïne arachnophobe, mais néanmoins débusqueuse d’araignées, ces angoissées-contrôlantes qui sont partout, qui tissent des liens partout, qui grouillent partout et qui s’infiltrent partout, dans nos rêves, sur les ondes et dans la synchronicité, partout, partout…
Le rêve reste un domaine encore magique, une terra incognita pouvant attirer les derniers explorateurs de dimensions mystérieuses en quête d’énigmes à résoudre et de réponses extraordinaires. C’est un gisement aurifère, une promesse d’Eldorado, la face cachée de de la Lune. Certains sont animés du désir de révéler ses pépites quand pour d’autres, c’est un désir de posséder, d’y planter leur bannière égotique en toute tranquillité. Il serait malséant d’appréhender le rêve et de le pénétrer dans une bête imposture, une attitude de rebelle Tartuffe.
Notes de bas de page :
[1] Paraphrase de : « Bizarre, bizarre… Mois j’ai dit bizarre ; comme c’est bizarre… » Réplique célèbre prononcée par Louis Jouvet face à Michel Simon dans le film de Marcel Carné : « Drôle de drame », 1937, dialogues de Jacques Prévert.
[2] Paraphrase de : « A force d’écrire des choses horribles, les choses horribles finissent par arriver. » Autre citation du même film, réplique de Michel Simon.
[3] Cette figure du père araignée pourra se déchiffrer dans un rêve avec des araignées à tendances mécaniques ou robotisées. Absent ou en substitution, le père ne joue pas alors son rôle de tiers séparateur, celui qu’il doit être pour défusionner la mère et l’enfant. Tous ces jeunes hommes qui sont toujours trop collés, soumis ou en colère contre leur mère ont dû manquer de tiers séparateur. Par sa prégnance, la mère araignée peut aussi se loger dans le bassin de sa fille et l’empêcher de procréer. La culpabilité instillée par la mère araignée peut aussi rendre anorgasmiques certaines femmes.
[4] Nous pouvons noter un renversement de rôle dans la Genèse, celle-ci prétendant que la femme serait issue de la chair de l’homme, ce qui peut échapper à tout sens logique ; biologiquement nous sommes tous issus d’une matrice, de la femme-mère. Une autre tradition met en scène Lilith, la première femme qui aurait engendré Adam, selon le mythe sumérien. Selon la tradition hébraïque, Lilith serait née de la même terre qu’Adam et serait donc son égale parfaite. Elle aurait refusé de se soumettre à Adam, notamment lors de l’accouplement – ne voulant pas être en-dessous – et se serait enfuie. Eve aurait été crée ensuite par Dieu pour répondre au désir d’Adam. Ce même Dieu va rendre Lilith stérile ou va la condamner à voir mourir tous ses enfants en raison de sa rébellion. Dans le mythe sumérien, Lilith veut dire « celle qui vit dans les arbres » ou « femme de l’air ». Ce sens va dans celui de Darwin et de l’évolution des espèces. Dans la tradition hébraïque, Lilith veut dire la nuit, la femme de la nuit ou démon. Elle est associée à la lune et au serpent, pouvant ainsi représenter la face sombre d’Eve, la double nature féminine. Lilith symbolise l’insoumission, la jalousie et la frigidité.
Quand à la naissance d’Eve, issue d’une côte d’Adam, si nous réfléchissons, il doit s’agir d’une mauvaise traduction ; la côte est le côté. A ce moment, nous retrouvons une cohérence ; il y a un côté féminin et un côté masculin et chacun de nous est constitué de ses deux dimensions, anima/animus.
[5] Comme Benoit Poelvoorde dans « Les deux mondes », film de Daniel Cohen, 1987, elle est aspirée dans le temps et se retrouve dans un autre monde. L’Autre Monde qu’elle passe en revue, est-ce le magazine de l’étrange de Jean-Paul Bourre ?
[6] S’il y a eu déficit du père ou un interdit de connexion avec lui, la fille souffre d’un manque de cette connexion avec son masculin intérieur ; il n’a pas pu se développer selon un modèle valide. Dans ce cas, la fille n’a pas de phallus psychique intérieur, d’où le sentiment de castration et la recherche de ce phallus à l’extérieur, par le substitut du père ou par la sexualité « interdite » (le plus souvent, liaison avec un homme marié, père si possible, et aussi par l’infidélité). De même, un garçon peut rechercher l’image du père manquant, son phallus, dans le même contexte.
[7] Synchronicité : communication ou transmission d’une information à différents endroits dans un moment contemporain sans support mécanique. Le lien entre les éléments synchronistiques n’a pas d’explication rationnelle, si ce n’est une forme de télépathie ou de connexion transindividuelle. L’exemple le plus commun de synchronicité est celui de la personne à laquelle on pense et qui soudain nous téléphone ou apparaît.
Lire à ce sujet le puissant livre de Jung : Synchronicité et Paracelsica.
La thématique du rêve de synchronicité est largement développée dans mon second ouvrage : « ENTREZ DANS VOS RÊVES, les différents niveaux de lectures du rêve ».
[8] Il apparaît que l’Inconscient n’est pas tant que ça un créateur d’images nouvelles. Il se sert de la palette d’images et d’émotions qui nous environnent et qui stimulent notre mémoire acquise, une sorte de banque de stockage d’informations visuelles pour la plupart, mais aussi auditives, sensitives, olfactives ou auditives. Même les déformations, les éléments fantastiques ou surréalistes qu’il produit ne sont souvent que de simples distorsions des images réelles que l’Inconscient a engrammées et qu’il interprète subjectivement ou émotionnellement, selon une grille de lecture spécifique à l’individu. Une couche plus profonde de l’Inconscient peut être génératrice d’images plus novatrices, voire inédites. Cette dimension n’est que peu accessible, si ce n’est par des personnes à la sensibilité très développée. Cette dimension n’intervient que très rarement dans le matériel onirique, sauf, là encore, chez les grands créateurs, artistes ou scientifiques. Il est donc possible de voir apparaître des images totalement inconnues dans nos rêves. Ces formes ou réflexions inédites ne sont pas abstraites pour tous ; elles peuvent être mise en application dans le réel. C’est tout l’art du créateur.
[9] La comptabilité, ce n’est pas une orientation que j’ai prise, bien que les statistiques des occurrences du rêve fassent partie aussi de mon études du rêve ; l’écriture de mon dictionnaire est fondée (la base) sur le recensement des principaux symboles que nous rencontrons dans les rêves, même si cette sélection est partiale ; elle correspond à ma sensibilité et à l’écoute spécifique des rêves que l’on me soumet depuis de nombreuses années. Je m’attache aux éléments les plus signifiants parmi ceux que je rencontre, les plus fréquents et les plus symboliques.
[10] Le propre d’une névrose est d’être un phénomène psychique itératif et chronique, qui se reproduit selon le même schéma. La névrose agit souvent à l’insu du conscient de l’individu et vient altérer sa relation saine au monde. C’est un système qui empêche l’individu d’évoluer dans le sens de sa pulsion de vie harmonieuse et qui est une rejouance d’un schéma répétitif affectif de l’enfance, une mauvaise structure qui aura été installée par son environnement. La névrose est aussi génératrice de bénéfices secondaires et maintient ainsi l’individu dans le principe de plaisir qui s’oppose au principe de réalité. Elle fige dans une époque qui est une strate de la construction psychique.
[11] La toute-puissance : chez l’enfant, le sentiment d’impuissance devant certaines situations qu’il ne peut pas gérer peut induire sa contrepartie, la toute-puissance infantile. C’est une revanche fantasmée sur le réel qui lui échappe, sur le monde que l’enfant subit parfois et qu’il ne peut pas contrôler. Si l’enfant n’avait pas cette capacité à dominer le monde par l’imaginaire, il aurait un sentiment d’écrasement et pourrait s’effondrer sur lui-même. Naturellement ; les jouets ou les fantasmes sont des supports pour lui de cette dimension où il peut dominer le monde, le contrôler ; cette phase où il s’autorise une expansion peut ensuite le mener à la véritable puissance. Si cette phase n’a pas pu bien se réaliser – non écoute permanente du désir de la petite fille ou du petit garçon, obéissance totale, rejet, objectification, sentiment de déni de sa place, parentalisation –, plus tard, il va subsister chez l’individu une propension à vivre dans le contrôle, la résistance ou l’usurpation sans vergogne. Ainsi, la mère infantile qui se sent menacée, peut agir de façon péremptoire, juger un domaine qu’elle ne connaît pas, affirmer des contrevérités sidérantes et confusionnantes laissant cois ses auditeurs qui n’osent la contrarier, par crainte de son instabilité d’humeur et de représailles, par honte pour elle, par pitié ou par assujettissement. C’est la toute-puissance de la mère araignée, celle qui s’identifie à la grande tisseuse cosmique, la mère de tout. Plus nous sommes face à une mère autoritariste, caractérielle, inique, anarchique, instable ou phallique, plus nous sommes face à un profil infantile. La toute-puissance maternelle est une perversion-prolongement de la toute-puissance infantile. C’est ce que je nomme le profil de la reine rouge.
Ce rêve fait par une étudiante des ateliers de formation au langage du rêve, et ancienne patiente, est très intéressant pour plusieurs raisons majeures.
– La première est que ce rêve correspond à une fin de travail thérapeutique et qu’il permet de nombreux développements psychologiques, psychanalytiques et psychothérapeutiques, notamment freudiens et jungiens.
– La seconde est qu’il inclut la thématique de travail des ateliers du rêve à l’attention du groupe ou du thérapeute. Que représente la figure du thérapeute dans les rêves ? Comment les participants l’intègrent-ils ainsi que le travail et comment le retransmettent-ils ?
– La troisième est qu’il met en scène une araignée, symbole omniprésent de nos rêves et pas anodin du tout.
– Et enfin, la quatrième est qu’il permet d’aborder un aspect important et singulier des rêves, celui de la SYNCHRONICITÉ, ce rêve ayant été fait dans un contexte très particulier, comme nous l’allons voir.
L’analyse-interprétation du rêve est très longue ainsi que les développements qui suivent sur la synchronicité, mais, comme annoncé, vous y découvrirez de grands thèmes psy, des schémas familiaux fréquents et d’étranges coïncidences. Une bonne demi-heure de lecture…
Analyse du rêve de synchronicité de Louise au travers de la découpe syntaxique, de l’entrée des personnages, des occurrences & du champ lexical, ainsi que par l’observation de la figure du thérapeute dans le rêve
EXPOSITION NARRATIVE 1 (Acte 1, scène 1, Entrée de l’héroïne) : Je vais dans la cuisine de mon appartement et j’allume la lumière, mais les coins sont flous et la lumière est bizarre.
Le rêve s’ouvre par une détermination de la rêveuse, son allant : elle fait son entrée et va dans la cuisine, le lieu des transformations et de l’alchimie intérieure. C’est une exposition claire et précise où elle entre en scène. De surcroît, Louise est bien déterminée à faire la lumière sur ses fonctionnements intérieurs et à séparer sa part à elle (son appartement) du monde informel et peut-être, d’un complexe familial. Nous voyons tout de suite qu’un processus d’introspection psychanalytique est à l’œuvre par cette première phrase, une volonté de prise de conscience.
Si l’action affirmée répond bien au désir de « l’introspectrice », le constat qui en découle est surprenant : les coins sont flous. Qu’est-ce que cela peut vouloir dire ? Tout d’abord, qu’ils ne sont pas nets. Il y a donc une mise au point qui est délicate, une difficulté à bien voir clair dans sa construction interne quand elle s’éloigne des grandes lignes ; elles ne se rejoignent pas. Les formes construites et les contenants étant en rapport avec la personnalité du père, nous pouvons tout de suite en déduire que la forme du père a été déficiente sur certains points de finitions, même si les grandes lignes sont là. Avait-il une propension à arrondir les angles et à ne pas s’affirmer suffisamment ? Ensuite la lumière elle-même (la conscience), qui appartient symboliquement à la dimension masculine, est bizarre. Il y aurait un autre déficit du père ; il n’a pas suffisamment éclairé sa fille et peut-être était-il bizarre lui-même.
Si nous prenons la formule au pied de la lettre, comment une lumière peut-elle être bizarre ? Il semblerait, dans le cas présent, qu’elle n’aille pas jusqu’au fond des choses et des recoins de la rêveuse, qu’elle puisse s’arrêter juste avant le coin, le point de jonction qui permettrait de résoudre la quadrature du cercle. Il peut s’agir d’une figure de style ; ce n’est pas la lumière qui est bizarre, mais ce qui est éclairé et révélé ou pressenti. Ouais, c’est bizarre et il va nous falloir garder ça au coin de l’œil.
RÉSOLUTION 1 (Acte 1, scène 2) : Je m’en vais car c’est très bizarre.
Si ça ne lui en bouche pas un coin, Louise est quand même perturbée et préfère décamper à la recherche d’un coin plus tranquille. Trop de bizarre et c’est le bazar ! Commencent ici des allées et venues où notre rêveuse va entrer et sortir de la scène à maintes reprises, venir, s’en aller, partir et revenir : Je vais x 2 – Je m’en vais x 3 – Papa va – Il doit venir – Je pars – partir – Je sors – Ils n’arrivent pas.
Ces occurrences des entrées et sorties de la scène sont importantes et symptomatiques, comme nous allons le voir au fil de l’interprétation. Tout cela peut indiquer une tendance à s’extraire d’un domaine quand il n’est pas suffisamment clair ou que certaines personnes sont bizarres.
CONTRE-EXPOSITION (Acte 2, scène 1 – 2ème entrée) : Plus tard mon fils de 6 ans vient dans la chambre et me dit que, dans la cuisine, il y a une araignée géante et qu’il a peur d’y aller.
Nous supposons que c’est la chambre de la rêveuse qui est évoquée, celle où la rejoint son fils apeuré. En effet, on le serait à moins : une araignée géante, c’est horrible ! Quelle drôle de cuisine ! Il s’y passe des choses bien étranges… A quelle sauce allons-nous être mangés ?
La chambre où le fils entre en scène pourrait être la dimension intime de Louise, son imaginaire d’enfant de 6 ans où elle se réfugie, un monde moins bizarre que celui des adultes. Dans cette dimension, la mère et le fils sont en connexion, écoute et compréhension, mais la cuisine pourrait être un monde qui est encore flou dans les encoignures, pas très clair pour Louise. Est-ce le monde des adultes ?
Réflexion : Je me dis que c’est bizarre que je ne l’aie pas vue, mais que cela explique pourquoi les coins étaient flous.
« Bizarre, bizarre, bizarre, Louise a dit trois fois bizarre, comme c’est bizarre[1] »… Sachant que ce qui est prononcé trois fois se réalise, nous pouvons surenchérir : « A force d’écrire des choses bizarres, les choses bizarres finissent par arriver[2] »… Alors, là, nous ne pouvons plus douter ; un drôle de drame s’est joué ou va se jouer dans cette cuisine, quelque chose de flou en relation avec le symbole de l’araignée. Il est possible que le drame soit encore rayonnant en Louise et perceptible par son petit garçon sensible. L’image de l’araignée est-elle latente quand la mère est avec le fils ; est-ce une facette floue de Louise ?
Ce qui est bien visible, c’est que Louise ne met pas du tout en cause la parole de son fils ; elle l’entend, en bonne mère. Elle trouve quand même bizarre qu’elle n’ait pas vue la bestiole, mais soupçonne alors une explication au floutage des coins, ce qui lui permettra peut-être de joindre les deux bouts plus tard et de démonter l’horreur annoncée, la matérialisation de l’araignée géante.
[1] Paraphrase de : « Bizarre, bizarre… Moi, j’ai dit bizarre ; comme c’est bizarre… » Réplique célèbre prononcée par Louis Jouvet face à Michel Simon dans le film de Marcel Carné : « Drôle de drame », 1937, dialogues de Jacques Prévert.
[2] Paraphrase de : « A force d’écrire des choses horribles, les choses horribles finissent par arriver. » Autre citation du même film, réplique de Michel Simon.
RÉSOLUTION de la Contre-exposition (Acte 2, scène 2) : J’y vais pour la voir.
Prenant véritablement son courage à deux mains pour surmonter sa peur du bizarre, décoincée et bien décidée à protéger son fils, notre mère courage retourne sur ses pas et va dans la cuisine pour LA voir. Elle veut maintenant en avoir le cœur net et, surtout, voir de quoi il retourne. L’introspectrice veut faire véritablement la lumière sur son cas et sur ce qui se tapit dans l’ombre sans se voiler la face. Le fait d’affronter ses peurs en regardant en face ce qui nous effraye est toujours une action positive en rêve, signe d’une volonté de comprendre ses mécanismes inconscients. Résolument, Louise s’approche de la révélation.
EXPOSITION 2 (Acte 3, scène 1 – 3ème entrée et pas des moindres) : Effectivement, il y a une araignée géante !
Enfin la voici, la star incontournable, le mythe terrifique, la déesse de la nuit, l’étoile de nos rêves et cauchemars, le fantasme absolu, la sublime, la seule, l’unique, la prestigieuse et illustrissime araignée ! Nous voici en présence de la figure la plus récurrente et la plus obsédante des rêves de l’humanité ! Inclinons-nous devant sa magnificence, cette figure ambiguë et velue qui cherche autant les coins d’ombre que les feux des projecteurs, la modeste histrionique dont les rôles sur nos écrans oniriques ne sont que rarement à la mesure de sa “mygalomanie”. Voilà ce que Louise ne pouvait pas voir et aussi le pourquoi : il y a eu une censure du Surmoi, à la Street View, par floutage des recoins. Ah, quand l’art est nié…
Approchez, approchez, Mesdames et Messieurs ! Venez frissonner devant la reine épeire ; qui plus est, elle est géante ! Alors, nous voilà projetés maintenant dans un vrai film d’épouvante, une série B fantastique et domestique ; la cuisine est l’antre d’un avatar dégénéré d’Arachné. Le fiston avait raison : quelle abomination !
Sachant que tous les protagonistes du rêve sont des figures de substitution, quoi ou qui représente-t-elle ? Est-ce une déclinaison de la rêveuse, sa face cachée ? Nous pourrions le penser, puisque son apparition est liée au fils et qu’elle officie dans la cuisine, lieu plutôt dédié à la mère. Si nous partons du postulat que, dans une pièce, une personne peut jouer deux rôles différents en changeant de costume dans un savant chassé-croisé, celle-ci ne peut pas apparaître sous deux formes différentes au même moment et au même endroit ; ce n’est donc pas Louise qui joue le rôle de l’araignée, à moins que ce ne soit son reflet et qu’il y ait un miroir psychanalytique, une psyché dans la pièce, le petit coin, le cabinet du thérapeute.
C’est une piste, mais l’attitude de Louise s’éloigne de cette forme, l’araignée représentant la mère négative, la mère étouffante ou dévorante, la mère possessive et manipulatrice qui veut emmailloter sa progéniture dans un cocon d’amour ou de culpabilité pour la garder et se nourrir de son amour. À aucun moment dans le rêve, Louise ne fait montre de possessivité, ni de manipulation envers son garçon ; elle est même très à l’écoute. Si c’est un reflet d’elle, il est minime et donc loin de l’araignée géante. De quelle mère s’agit-il alors ? C’est ce que nous allons essayer de découvrir dans la suite de notre enquête fébrile et arachnéenne en suivant le fil de Soi. Allons nous faire une toile !
Nous sommes tous confrontés à cette figure de l’araignée puisqu’elle est intrinsèque à la nature de la mère, cependant, cette dimension archaïque est variable selon les personnes et les moments. Il est évident que la majorité des mères savent juguler cet aspect et que l’intelligence du cœur empêche cette propension toxique. De plus, la conscience vient contrecarrer l’inclination pour cette face sombre maternelle. Nonobstant, l’araignée doit sa popularité à celles qui se laissent dominer par la pulsion arachnéenne primitive, celles qui tissent leur toile engluante inlassablement, aveuglément.
NARRATION 2 (Acte 3, scène 2) : J’ai peur et je pars dans la chambre de mon fils pour être avec lui. Je lui dis de ne pas s’inquiéter, que papa va tout arranger.
Si elle a surmonté sa peur pour constater la véracité des dires de sa progéniture, Louise n’en mène pas large et préfère prendre une nouvelle fois la poudre d’escampette. Décidément, notre maman préfère la chambre d’enfant et n’aime pas faire la cuisine. Elle n’y retournera pas puisque la reine y est.
Louise se réfugie dans la chambre de son fils… pour se protéger ou pour le protéger ? La phrase est ambiguë ; elle indique une régression de la rêveuse qui cherche du secours auprès de son garçon avec lequel elle fusionne. Néamoins, c’est une mère aussi qui a écouté son fils, a vérifié ses dires et qui le rassure par sa présence. La seconde phrase ne laisse plus planer de doute ; elle sait trouver les mots pour réconforter l’enfant : papa est fort ; il va tout arranger dès son retour. C’est aussi à elle-même qu’elle se parle, sans doute pour se rasséréner ; elle se trouve confrontée à ses terreurs enfantines et une partie d’elle est en attente de la présence positive du père.
RÉSOLUTION 2 (Acte 3, scène 3, entrée/évocation du père) : Et quand son père rentre du travail, il fait effectivement partir l’araignée.
Chose promise, chose due ! Maman n’a pas menti ; papa est fort ; il a réussi à chasser le monstre, tout du moins, nous le ou la croyons sur parole, puisque nous n’assistons pas à la scène. Néanmoins, nous ne reverrons plus l’araignée gênante. Partie, volatilisée… Bravo ! Nous apprenons du même coup que papa travaille, qu’il assume toutes ses fonctions, capable de chasser les monstres après une dure journée de labeur. Voilà qui est encore plus rassurant et idyllique ! Chacun est à sa place traditionnelle, le père assume son rôle de pierre angulaire. Quelle belle résolution ! Tout est bien qui fini bien. Pourvu que ça dure…
Nous pouvons voir dans cette séquence une donnée fondamentale quant à la présence de l’araignée. Cette dernière ne peut se mettre à régner que si le père ne prend pas sa place. S’il est trop absent physiquement ou moralement, démissionnaire ou infantile, la mère est angoissée par trop de devoirs ou de tâches, des responsabilités qui l’obligent à être partout, à s’inquiéter pour l’enfant, à trop fusionner avec lui ou à trop le contrôler. Son amour engluant, sa possessivité, son angoisse, sa mauvaise humeur ou sa tyrannie ne peut s’exprimer que s’il y a déficit de l’époux et de son rôle de père de l’enfant. C’est d’autant plus vrai si la propension araignée est surdéveloppée chez certaines mères, par prédisposition naturelle ou par parentalisation précoce.
Cette configuration du père déficitaire qui favorise la mère araignée est consternante de banalité actuellement, tellement les pères ne savent pas prendre leur place, n’ont pas envie de se battre quand leur épouse les excentre et qu’ils les laissent ou les encouragent à devenir des angoissées contrôlantes, des monstres (control freak en anglais). Ce cas de figure n’est pas exclusif à notre époque, mais il peut s’accentuer aujourd’hui, surtout quand le père se maternise, qu’il ne sait plus très bien quelle est sa place et qu’il tend à se substituer à la mère. Dans ce cas, le père peut devenir araignée lui aussi et entrer en compétition avec son épouse[3].
[3] Cette figure du père araignée pourra se déchiffrer dans un rêve avec des araignées à tendances mécaniques ou robotisées. Absent ou en substitution, le père ne joue pas alors son rôle de tiers séparateur, celui qu’il doit être pour défusionner la mère et l’enfant. Tous ces jeunes hommes qui sont toujours trop collés, soumis ou en colère contre leur mère ont dû manquer de tiers séparateur. Par sa prégnance, la mère araignée peut aussi se loger dans le bassin de sa fille et l’empêcher de procréer. La culpabilité instillée par la mère araignée peut aussi rendre anorgasmiques certaines femmes.
EXPOSITION 3 (Acte 4, scène 1 – 4ème & 5ème entrées) : Ensuite, je me trouve dans une pièce qui est une annexe d’une maison comme un garage. Il y fait sombre et il n’y a presque pas de lumière. Les murs sont bleus/verts (turquoise) comme la couleur de la cuisine. Dans cette pièce, je me retrouve avec Tristan et une femme d’une cinquantaine d’années.
Après avoir éclairé sa cuisine interne, Louise nous invite à explorer davantage ses tréfonds, lieux qui semblent prendre l’apparence d’un garage. Cependant, si nous nous fions à la couleur dudit garage, malgré le manque de lumière, il est probable que nous n’ayons pas quitté la cuisine et que nous soyons dans une couche plus profonde et plus sombre de l’Inconscient de la rêveuse, les recoins. Il y a toujours unité de bleu, donc unité de lieu. Cette annexe semble cependant avoir déjà été explorée en cabinet puisque nous y trouvons son thérapeute, votre serviteur en l’occurrence. Louise m’anime dans le théâtre intime de son prisme psychique turquoise. De plus, elle me prête une collègue ou une compagne d’une cinquantaine d’années. Cette dernière pourrait être mon double féminin ou une déclinaison de la mère. La configuration est freudienne à souhait puisque Louise reforme le triangle œdipien ; le trio incluant un couple adulte avec le rêveur représente très souvent ce triangle. La présence du thérapeute confirme le triangle œdipien ; la plupart des patients font un transfert positif sur cette figure, projetant l’image du père idéal, celui qui écoute, comprend et propose un cadre. Après l’enfant, Louise fait entrer les parents sur scène avec le thérapeute/père, la quinquagénaire/mère. Louise peut rejouer alors sa place d’enfant et sa relation dans le cadre parental, la triangulation.
La syntaxe de la phrase qui fait entrer les deux substituts parentaux confirme que ce travail d’introspection est plutôt fructueux, puisque Louise « se retrouve », elle-même avec Tristan. En second plan, la cinquantenaire peut évoquer une autre psy qu’aurait consultée Louise. Sa représentation et son identification ne sont pas nettes. L’image du père-substitut est plus claire et identifiée ; cela nous incline à penser que Louise valide cette forme contemporaine, qu’elle lui donne plus de valeur lui ayant permis de se retrouver.
Ainsi, la lumière commence à se faire, lentement, à l’intérieur d’elle, sur sa nature intrinsèque et sur ses représentations parentales. C’est sans doute pour mieux s’en séparer, prenant conscience d’elle-même. Bien que très faible dans ce passage du rêve, la couleur est très positive, le turquoise étant un mélange du vert de la mer (inconscient) et du bleu du ciel (conscient). Il y a beaucoup de propositions symboliques, toujours très positives, qui sont liées à cette couleur, donc, nous ne garderons que celle d’une teinte spirituelle qui commence à poindre. Elle s’oppose, par sa valence positive à la présence de l’araignée. Louise entrevoit une réunion harmonieuse du masculin et du féminin, un futur qui chante ; le bleu lumineux, c’est aussi la conscience.
La transformation de la cuisine en garage-annexe est curieuse. Un glissement sémantique nous invite à y voir une mise en garde contre le passage du temps et la sénescence : gare (à l’) âge !
NARRATION 3 (Acte 4, scène 2) : J’interprète mon rêve avec l’araignée et je dis que cela représente la mère castratrice.
Oh, oh ! Notre rêveuse est une experte en interprétation (c’est normal ; elle a suivi la formation E.V.E.R), tout autant qu’elle a un recul extraordinaire ; elle peut interpréter la section précédente du rêve dans la continuité. Nous sommes bien entrés dans une couche plus profonde du rêve puisque Louise est capable de se distancier, tout en rêvant, de la première couche du rêve et de l’analyser. Face à son panthéon onirique, elle reconnaît un avatar de Kali, la déesse courroucée, la mère mortifère et castratrice. Pour Louise, cette verbalisation est une affirmation de soi ; elle est capable d’exprimer une pensée personnelle face aux imagos parentales. Nous pouvons noter que Louise a écrit qu’elle interprète son rêve avec l’araignée et non pas son rêve d’araignée, ce qui veut donc dire qu’elle peut confondre la femme présente avec l’araignée.
Conséquence de l’affirmation de la NARRATION 3 – dialogue de sourds : Tristan est d’accord alors que cette femme dit que non, que ceci est uniquement l’interprétation première, mais que, comme c’est elle qui a écrit le dictionnaire à la base, elle sait mieux que Tristan ce que cela veut dire et qu’elle n’est pas d’accord car il faut voir plus loin que cela. Tristan soutient sa propre théorie et elle la sienne ; ils n’arrivent pas à se mettre d’accord.
Le père-thérapeute valide l’expression de sa fille et permet, par cette reconnaissance, la narcissisation de l’enfant, processus nécessaire à la confiance en soi. Si c’est un écho de la transmission de ce même père, il est judicieusement utilisé et compris. En revanche, la femme-mère est revêche et s’oppose à l’affirmation de sa fille ; même si elle argumente ensuite, son NON est castrateur. Alors, voilà démonstration brillamment mise en scène de Ce Qu’il Fallait Démontrer : la mère, par son veto, ne reconnaît pas l’expression de la pensée de sa fille, pensée qui révèle et dénonce l’action castratrice maternelle, celle de la dimension de l’araignée (avec l’araignée). Par son opposition, la mère péremptoire inféode sa fille pour garder sa place de première dame et l’empêcher de la dépasser, processus semi-conscient. Si Louise ne la juge pas, la femme se sent certainement attaquée dans son rôle de mère. Il va s’en suivre une affirmation hallucinante de sa part : c’est elle qui aurait écrit la base de mon dictionnaire des symboles oniriques ! Ou je suis totalement inconscient ou elle ne manque pas de toupet !
Nous pourrions considérer que la femme représente mon intuition, ma partie féminine inspirante ou mon anima, mais l’antagonisme mis en scène évoquerait un conflit intérieur, or celui-ci ne permettrait pas la gestation dudit dictionnaire, les deux pôles n’étant pas en harmonie. La querelle mise en scène correspondrait plus alors au conflit interne de la rêveuse entre son anima et son animus, une pollution atavique de ses parents et un transfert négatif. Cette pollution, encore active, la bloquerait dans son évolution, la dépense d’énergie inhérente au conflit amoindrissant son potentiel.
Mais revenons à l’affirmation gonflée. Ainsi donc, la contradictrice prétend être à la base de mon travail… Si nous observons les éléments symboliques, la base, c’est la terre, le substrat, le fondement, le féminin, la chair, la matrice dont chacun est issu. Dans ce sens, je suis bien né ici-bas, d’une mère qui m’a transmis la vie, un héritage biologique et génétique. Elle m’a donné aussi son amour. Dans le cas présent, la cinquantenaire revendique cette maternité, de corps et d’esprit, envers l’enfant. Elle s’approprie tout ce que peut développer sa progéniture et aussi ses projets ; elle en est la base. Dans l’hubris de la matriarche, elle s’approprie ainsi tout ce qui vient du mâle, celui qui n’enfante pas, même s’il a déjà procréé lui aussi ; il n’est que son prolongement. Elle le castre. C’est elle la matière première, la chair originelle, rôle qui lui est dénié dans la Genèse ; Eve serait issue de la côte d’Adam. Cette usurpation de procréation peut être à l’origine de la première frustration historico/hystérique, ce que Freud nomme le complexe de castration chez la femme, générateur d’un désir de revanche.
L’homme, symboliquement, c’est le haut, le ciel, l’intellect. Il est amené à devoir s’échapper de l’attraction terrestre, celle de la mère, pour pouvoir ensemencer une autre terre. Cette semence peut être intellectuelle aussi, or dans les deux cas, l’homme doit toujours garder ses racines, son féminin intérieur pour être en équilibre. Pour cela, il doit être capable de séparer la mère possessive du féminin, rejeter l’emprise maternelle, mais respecter et aimer cette énergie féminine qui l’anime et le pousse à créer.
Cette hypothèse pourrait expliquer le désaccord des deux représentants parentaux mis en scène ici, la revendication de l’usurpatrice et son outrecuidance. Elle invite pourtant à voir plus loin, à ne pas oublier que c’est elle la base, l’énergie primordiale qui anime tout. Cette invitation pourrait stimuler l’intelligence de sa fille, mais comme elle n’explique pas vraiment ni ne donne de piste, cela ressemble plus alors à de l’embrouillage ; elle laisse entendre qu’elle est à l’origine de tout, qu’elle a tout compris et que sa fille n’est pas très intelligente si elle ne comprend pas. C’est le fameux : « Vous voyez ce que je veux dire… » Hé bien non ! Nous ne voyons pas du tout ce qu’elle veut dire. Les sous-entendus sont toujours malsains, confusionnants, à l’origine des désordres émotionnels, de l’impertinence des sentiments et de la corruption d’une pensée claire.
Nous pouvons imaginer cependant une orientation confuse et une invitation à la toute-puissance : « Vois plus loin que le bout de ton nez, ma fille, pense à ton avenir. Le seul avenir possible pour une femme, c’est que tu deviennes comme moi (une araignée) et que tu entres dans le matriarcat ; approprie-toi le travail de l’homme si tu ne veux pas qu’il te dépossède comme tous ceux de son genre ; c’est toi qui l’a créé. Rappelle-lui toujours d’où il vient. »
Devant l’incohérence du propos et l’appropriation de son travail – un vol intellectuel – le substitut paternel ne l’entend pas de cette oreille ; il tombe ainsi dans le piège de l’araignée et se laisse alors manipuler puisqu’il entre dans la controverse. C’est la stratégie du conflit, la culture de ceux qui n’en ont pas, la manipulation instituée par la femme jalouse des prérogatives masculines, celle qui veut castrer puisqu’elle souffre elle-même d’un complexe de castration, tradition perpétuée et acte perpétré par des siècles de culture et par sa propre mère (toutes les femmes ne souffrent pas de ce complexe, heureusement).
La phrase mensongère et ambiguë réussit à engluer l’homme dans la toile qu’elle vient de lui tendre. C’est le lien qu’elle veut instituer encore avec lui, pouvant lui reprocher de s’éloigner, d’avoir mille autres centres d’intérêt qu’elle, dont sa fille dont il serait trop proche. Les reproches dans un couple sont les pires des tue-l’amour, responsables d’un effet pervers : ils engluent dans la culpabilité celui qui les subit tout en l’éloignant des sentiments du cœur. La culpabilité et la colère se substituent alors au sentiment amoureux positif pour créer un couple dysfonctionnel, conflictuel et… fusionnel quand même. Quand on ne sait plus s’aimer, on peut se détester, s’entredéchirer et se faire souffrir pour maintenir le lien. Cette configuration est la cause de tous les conflits sempiternels et le conflit créé l’attachement.
RÉSOLUTION 3 (Acte 4, scène 3) : Je m’en vais car je trouve cette discussion un peu lourde.
Opération marâtre réussie : en stimulant le couple conflictuel, la femme refusionne avec le mari et sépare le père de la fille. Blanche-Neige, alias Louise, se retire ainsi du triangle et ne fera pas son Œdipe. Elle s’en va une nouvelle fois et abandonne sa place. Après le transfert positif, le thérapeute perd sa place idéalisée ; l’Inconscient de Louise est submergé par l’image résiduelle du père abandonnique et génère le transfert négatif, contrepoint fréquent après l’idéalisation. Ce transfert négatif peut être seulement ponctuel, très circonstanciel, et le « transférant » peut passer d’un pôle à l’autre parfois. Parfois, le transfert négatif s’installe définitivement et le thérapeute est alors diabolisé. Cette phase est favorable à la conservation des névroses, dans la mécanique de résistance psychologique. La plupart du temps, dans les cas les plus lourds, c’est l’attachement à la souffrance qui favorise cette contre phase, un attachement proportionnel à la souffrance vécue.
Ha oui ! Nous sommes d’accord avec elle ; c’est lourd d’avoir deux parents abandonniques, tout autant qu’ils sont écrasants pour leur enfant. Lassée d’arrondir les angles et fuyant l’atmosphère pesante, elle les laisse à leurs hypothèses masturbatoires et à leur polémique entre la théorie de l’évolution et la théorie du complot. Ils ne pourront tomber d’accord. La forme du couple conflictuel va alors s’engrammer dans l’Inconscient de la fille pouvant lui faire rejouer ce schéma dans sa ou ses futures relations.
Les retrouvailles de Louise avec son mari, père aussi de son enfant, n’ont été que de courte durée. Les schémas mortifères parentaux sont venus se superposer à la quiétude du foyer qu’elle avait réussi à créer. La pollution mentale la pousse à la nomadisation affective et l’empêche de pérenniser la forme attendue et magnifiée du couple avec enfant, de s’accomplir dans le cadre familial sédentaire.
Une nouvelle fois, nous constatons l’échec de la relation homme/femme qui se mute en lutte de pouvoir. Si nous revenons aux valences symboliques des pôles masculin et féminin, ces deux aspects sont opposés, mais complémentaires. Si l’homme ne doit pas se couper de son féminin intérieur pour ne pas se dessécher et perdre ainsi l’usage du langage et de la créativité, la femme doit préserver son masculin intérieur pour se réaliser de façon concrète dans le monde, être capable d’agir et de mettre en forme tout ce que sa nature féminine pressent. Elle doit nourrir ce pôle masculin et ne pas se substituer à lui, sous peine de concurrence et de dysharmonie. Cette tendance à la substitution à l’homme est le symptôme d’une castration que subit la femme depuis des générations, une incapacité et un interdit de communier avec son pôle masculin intérieur. Cela induit une dépendance-colère aussi à l’homme, tradition perpétuée par… le matriarcat. Nous venons de voir comment la mère-araignée a induit un mécanisme acquis de séparation d’avec l’homme.
Or, les épousailles des opposés, ne sont pas seulement issues d’un fantasme, mais bien d’une réalité inscrite en nous, une forme idéelle à atteindre. La couleur de la cuisine, lieu du mélange des énergies et de la transmutation, nous confirme la possibilité de cette harmonie entre le féminin et le masculin, le vert de la mer et le bleu du ciel. La couleur turquoise, éminemment positive, est le symbole de cette fusion intérieure, de la gnose réalisée en nous, de l’amour inconditionnel de l’autre, ce même amour que chaque parent a pour ses enfants, s’il n’y a pas trop de névroses installées.
EXPOSITION 4 (Acte 5, scène 1 – 6ème entrée en évocation) : Je sors à l’extérieur de la maison et j’ai un rendez-vous avec O. mon premier petit ami important ; il doit venir et je l’attends devant la maison.
Louise est hors d’elle et hors du temps. Elle se remémore ses attentes, ses désirs de vie. Elle se retrouve à l’époque de son premier grand amour, O. Il est possible qu’il symbolise l’Opposé, le masculin extérieur fantasmé, le substitut du père démissionnaire ou celui qui été éloigné d’elle, celui qui pourrait lui permettre d’atteindre la plénitude du cercle amoureux, le « Ooooooh, c’est bon »… C’est un phénomène psychologique connu, une déclinaison de la dépendance affective (l’attente de celui qui doit venir, une sorte de Messie) engendrée par la carence de l’Opposé. Ce mécanisme induit une idéalisation et une exacerbation du désir sexuel face au vide hystérique. Or qui dit idéalisation, dit déception assurée après l’Osmose, la phase lune de miel (période de fusion harmonieuse ou passionnelle, d’appétence et de sexualité débridée) ; l’autre ne sera jamais à la hauteur de ses attentes. Ooh, c’est déjà fini…
Cette histoire d’O qu’a vécue autrefois Louise pouvait être l’espoir pour elle d’écrire un nouvel Opus avec le petit ami, de former un couple la menant à son épanouissement de femme, puis de mère, pour réparer le triangle Originel qui n’avait pas fonctionné.
O.pourrait être aussi Oreste, le matricide, celui qui est capable de tuer sa mère castratrice, Clytemnestre, celle qui a comploté et a fomenté le trépas de son époux, Agamemnon, avec son amant, le funeste médecin Egisthe.
Il est possible que cette scène primitive de la fuite de la maison familiale et du rendez-vous avec le premier garçon aimé ait été vécue comme la grande libération. Cet épisode aurait marqué fortement le psychisme de Louise, la faisant fantasmer et idéaliser ce moment particulier : le Oui de la reconnaissance mutuelle, de l’acceptation par l’autre, le sentiment d’avoir enfin une place, ce qui aurait pu aussi la pousser à rejouer ce moment dans sa vie : sortir du cadre familial pour retrouver l’être aimé, l’amant extérieur et rejouer les premiers moments de la fusion Orgasmique. Le mouvement des allées et venues serait celui-ci : Louise sort une deuxième fois de la scène pour attendre celui qui doit venir. Elle est en posture d’attente. Or, l’attente, c’est l’enfer – surtout pour un enfant qui souffre d’abandonnisme –, c’est revivre le vide glacial de l’absence à soi.
Constat : Je vois qu’il y a de la neige à l’extérieur, mais il ne neige pas.
S’il y a de la neige alentour, c’est qu’il a neigé ; élémentaire mon cher Watson ! Le blanc est la couleur de l’absence. Il y a donc eu une période glaciaire, un grand manque d’amour dans la vie de notre infortunée rêveuse, la petite marchande d’allumettes. A force d’être exclue de la relation au père et exposée au NON de la mère, la petite fille n’a jamais eu vraiment de place auprès des deux parents et souffre encore de cette exclusion, de la froidure de l’absence d’amour. Pourtant, si elle ne peut s’empêcher de quitter son foyer, celui qu’elle a créé, dans l’attente d’une nouvelle histoire d’O, elle sait aussi qu’elle va revivre la froidure de l’exclusion dans le monde extérieur.
La construction de la phrase peut nous intriguer. Elle induit un état advenu autrefois et qui ne serait pas encore dégelé, mais Louise ne produit plus de froid, ni n’en reçoit. C’est donc plutôt bon signe. Néanmoins, il pourrait y avoir une menace qui plane encore, le risque de retomber dans le schéma et d’abandonner sa place : laisse tomber la neige.
Réflexion 4,1 : Je me dis que cela ressemble étrangement à la maison où j’ai habité avec mon père et que, dans mon rêve, je mélange les deux mondes.
Nous y voilà ! Effectivement, c’est bien ça : la rejouance de l’abandon et la confusion entre les deux époques. Si le père est bien identifié, la douleur liée à son inaccessibilité est aussi bien dépeinte. C’est la déréliction. Tout se mélange émotionnellement et il n’y a là rien d’étrange. A un autre niveau, nous avons la confirmation que la rêveuse a la capacité d’explorer les couches du rêve, comme les couches de son histoire, ces deux mondes parallèles[4]. Louise a atteint un niveau de conscience très important par l’introspection psychanalytique. Elle est capable de voir qu’un schéma de séparation est à l’œuvre dans sa vie actuelle, schéma primitif qui est la rejouance du conflit parental. Celui-ci la pousse à répéter le désaccord du couple.
Inconsciemment, Louise a reproduit le schéma d’abandon et d’arrachement, le déracinement. Nous supposons par cette réflexion : « où j’ai habité avec mon père », qu’il y a eu séparation de ses parents dysfonctionnels (ouf !) et qu’il y a eu cohabitation avec le père, un déplacement, donc un éloignement de la mère ; cette dernière est absente de la scène. La froidure mise en scène amène cette question : l’anathème jeté par la mère araignée a-t-il interdit le lien entre le père et la fille alors qu’ils ont vécu en proximité ? Nous n’aurons pas la réponse directe dans ce rêve, mais nous pouvons la déduire ensuite.
[4] Comme Benoit Poelvoorde dans « Les deux mondes », film de Daniel Cohen, 1987, Louise est aspirée dans le temps et se retrouve dans un autre monde. L’Autre Monde qu’elle passe en revue, est-ce le magazine de l’étrange de Jean-Paul Bourre ?
Constat / Réflexion 4,2 (Acte 5, scène 2) : O. est en retard et cela m’ennuie de l’attendre ; je n’ai pas envie de rester là à l’attendre ; il n’avait qu’à être à l’heure…
Cet anathème est puissant puisqu’il semble qu’il ait interdit le lien avec l’homme attendu. Effectivement, l’homme espéré n’arrive pas, n’est pas arrivé. Tout se mélange, mais Louise opère ici une prise de conscience ; elle ne veut plus s’ennuyer, être absente à elle-même en étant dans l’attente de l’autre, l’homme extérieur, le supposé sauveur. Elle se reconnecte avec son désir, lassée d’être dépendante de celui de l’homme. La pièce ne s’est pas jouée ? Tant pis, il n’avait qu’à être à l’heure, arriver quand c’était le moment. Oreste… Non, je pars. Maintenant, qu’il aille se faire voir ! Il n’avait qu’à être haleur de bateau ivre, là où fermentent les rousseurs amères de l’amour !
RÉSOLUTION 4 (Acte 5, scène finale) : …donc, je m’en vais !
Pour la troisième fois, Louise quitte la scène. Elle s’en va, lassée des sanglots longs qui ont blessé son cœur d’une langueur monotone. Louise est-elle prisonnière de ce schéma de fuite qui la fait sortir de toutes les structures ? Est-elle condamnée à rejouer éternellement ce scénario d’abandon, à errer au vent mauvais, à s’attacher à des hommes lointains ou inaccessibles et à les attendre[5] ?
Non, cette troisième affirmation la mène à l’éveil puisqu’elle se réveille. C’est la fin des va-et-vient et de l’incertitude. Nous pouvons supposer une prise de conscience magistrale, un véritable désir de sortir de ce schéma. La neige est tombée, il n’est pas venu ce soir, mais il n’y aura pas de désespoir ; Louise n’attend plus de l’autre, mais bien d’elle-même. Dans cette scène finale, une troisième et dernière fois, elle est venue nous dire : « je m’en vais ». Elle tire le rideau, définitivement, fait ses adieux à jamais sur son passé confusionnel.
Si Louise se retrouve seule à la fin du rêve, c’est qu’elle n’est plus dépendante de personne ; n’oublions pas qu’elle a validé la figure du père de son fils. Cela veut donc dire qu’elle préfère maintenant la relation réelle et la jouissance à la relation de frustration. Elle n’attend plus le fantôme de celui qui l’a quittée, préférant la réalité (son conjoint et son fils) à l’embrouillage. Elle sort de la dépendance affective et de la raie niée.
[5] S’il y a eu déficit du père ou un interdit de connexion avec lui, la fille souffre d’un manque de cette connexion avec son masculin intérieur ; il n’a pas pu se développer selon un modèle valide. Dans ce cas, la fille n’a pas de phallus psychique intérieur, d’où le sentiment de castration et la recherche de ce phallus à l’extérieur, par le substitut du père ou par la sexualité « interdite » (le plus souvent, liaison avec un homme marié, père si possible, et aussi par l’infidélité). De même, un garçon peut rechercher l’image du père manquant, son phallus, dans le même contexte.
Observation du rêve dans son contexte de synchronicité *
Nous allons aborder maintenant le contexte singulier de ce rêve, celui de la synchronicité, une concordance bizarre de deux éléments similaires qui n’ont aucun lien entre eux.
Voici ce contexte :
Le 25 juin 2014 une émission consacrée au rêve a été diffusée sur une grande radio où était interviewée une neurologue qui fait des statistiques sur le rêve dans le cadre de son travail et qui a publié un livre sur ce sujet.
J’avais été contacté auparavant par une journaliste de cette radio pour faire une intervention sur le langage du rêve dans le cadre de cette émission, intervention préenregistrée et incrustée dans l’émission au cours de sa diffusion.
Dans le dernier quart de l’émission, mon intervention est diffusée (durée 3’30”). Dans celle-ci, on m’interroge sur l’articulation du langage du rêve et sur le symbolisme de l’araignée, comme exemple ; je développe et parle de l’image de la mère possessive ou abusive. Après mon propos, l’animatrice interroge l’invitée sur la présence de ce symbole dans les rêves, sa récurrence et comment elle l’interprète. La spécialiste confirme que l’araignée est assez présente dans les rêves et qu’il y a des « bébêtes » (sic) dans les rêves (4%), mais qu’elle ne les interprète pas. Elle dit qu’il y a aussi des grosses bêtes, terrorisantes chez ceux qui ont des terreurs nocturnes, et des petites bêtes, mais que ces bêtes représentent ce qu’elles sont. Bizarrement, le ton devient soudain un peu sarcastique, puis méprisant et elle ajoute (avec un rire de gorge forcé, façon poule en train de pondre) : « Par contre, on n’interprète pas du tout ça d’un point de vue symbolique : une araignée, c’est une araignée, point ! En science on n’est pas dans une surinterprétation des faits. La personne dit qu’elle a vu une araignée, ce n’est pas quelqu’un d’autre (entendre : l’araignée ne représente pas une autre personne). » Je suis de plus en plus consterné et réalise alors qu’il n’y a pas que dans les rêves qu’il y a des bêtes, sur les ondes radiophoniques aussi, il y a de grosses bébêtes.
Voilà le contexte ! Le rêve de Louise a été fait dans la nuit qui a suivi la diffusion de l’émission, du 25 au 26 juin 2014, sans qu’elle ait écouté l’émission. Louise m’a raconté son rêve ensuite, en cabinet, le 30. Ce fut une séance de résolution. Nous l’avons ensuite analysé en atelier.
Etonnante synchronicité, non ! Et drôle aussi.
* Synchronicité : communication ou transmission d’une information à différents endroits dans un moment contemporain sans support mécanique. Le lien entre les éléments synchronistiques n’a pas d’explication rationnelle, si ce n’est une forme de télépathie ou de connexion transindividuelle. L’exemple le plus commun de synchronicité est celui de la personne à laquelle on pense et qui soudain nous téléphone ou apparaît.
Lire à ce sujet le puissant livre de Jung : Synchronicité et Paracelsica.
La thématique du rêve de synchronicité est largement développée dans mon second ouvrage : « ENTREZ DANS VOS RÊVES, les différents niveaux de lectures du rêve, Editions Trajectoire ».
Pourquoi ?
La question qui se pose maintenant, c’est celle du pourquoi. Comment se fait-il qu’il puisse y avoir une coïncidence de propos, de personnage et de temps entre le rêve de Louise et le contenu de l’émission ? C’est bizarre, non ? Si trop de bizarre ne vous effraie pas ni ne vous incite à vous en aller, observons maintenant ce phénomène que Jung nomme « Synchronicité ». Ces symétries et analogies surprenantes existent bien dans la vie réelle et plus encore dans les rêves. En ma qualité d’onirologue qui peut entendre des dizaines de rêves dans une semaine, j’observe des rêves faits par des personnes qui n’ont absolument aucun lien, rêves qui ont parfois la même structure, les mêmes images, la même histoire, le même contenu ou des détails dont la similarité est manifeste et troublante. Ce phénomène se produit par vagues. Je peux rester un an sans entendre de rêves de synchronicité, puis il y aura une occurrence de ce phénomène, d’autant plus que je peux être sensible à celui-ci, s’il met en scène des éléments de ma propre vie. Les rêveurs ne sauront rien de cette synchronicité onirique si je ne les informe pas de la coïncidence, ce que je fais rarement pour ne pas produire d’interférence, sauf si cela est vraiment signifiant pour le sujet. Comme je n’ai pas accès non plus à tous les rêves de la planète – heureusement – il est possible que des milliers de rêves contenant les mêmes informations se produisent simultanément dans tous les pays du monde, sans que nous puissions les recouper, ou que les synchronicités concernent seulement des zones du globe sensibles à des moments particuliers.
Alors, quant au pourquoi… le rêve se sert du matériel contemporain le plus signifiant. Il fonctionne par analogie quand l’Inconscient entre en résonance avec des événements contemporains de l’extérieur pour parler de notre monde endogène. C’est la raison pour laquelle le contenu manifeste du rêve emprunte des scènes ou des éléments de la veille qu’il déforme plus ou moins ou reproduit selon le sens qu’il tend à signifier par le contenu latent[6] (principe de distorsion). Le matériel contemporain usité peut être seulement restreint à des faits privés ou bien ouvert à des événements plus collectifs. Il est possible que certains événements exogènes à notre histoire soient extrêmement rayonnants au moment de leur déroulement et puissent ainsi être captés pendant le temps du sommeil, parce qu’ils sont signifiants pour nous. Ce serait donc le cas pour Louise qui aurait perçu dans son rêve cette tension et le conflit d’écoles émis sur les ondes. C’est sans doute parce que cette problématique entre en résonance intensément avec son histoire et avec une réflexion relative à celle-ci au moment du rêve, celle de l’araignée symbolique, l’image de la mauvaise mère. Dans tous les cas de synchronicité, il y a un observateur ou un acteur qui envoie l’information, un émetteur. Une radio est un émetteur aux rayonnements puissants pouvant être relayés par des milliers d’auditeurs témoins. Il est possible que Louise ait reçu cette information par ce biais, inconsciemment. C’est l’explication la plus plausible, les concordances sont trop importantes pour qu’il ne s’agisse que d’un simple hasard.
[6] Il apparaît que l’Inconscient n’est pas tant que ça un créateur d’images nouvelles. Il se sert de la palette d’images et d’émotions qui nous environnent et qui stimulent notre mémoire acquise, une sorte de banque de stockage d’informations visuelles pour la plupart, mais aussi auditives, sensitives, olfactives ou auditives. Même les déformations, les éléments fantastiques ou surréalistes qu’il produit ne sont souvent que de simples distorsions des images réelles que l’Inconscient a engrammées et qu’il interprète subjectivement ou émotionnellement, selon une grille de lecture spécifique à l’individu. Une couche plus profonde de l’Inconscient peut être génératrice d’images plus novatrices, voire inédites. Cette dimension n’est que peu accessible, si ce n’est par des personnes à la sensibilité très développée. Cette dimension n’intervient que très rarement dans le matériel onirique, sauf, là encore, chez les grands créateurs, artistes ou scientifiques. Il est donc possible de voir apparaître des images totalement inconnues dans nos rêves. Ces formes ou réflexions inédites ne sont pas abstraites pour tous ; elles peuvent être mise en application dans le réel. C’est tout l’art du créateur.
La cuisine de l’extrême
La problématique de Louise, nous l’avons bien comprise, est celle de sa place de mère ainsi que de sa place de femme. C’est aussi son rapport avec sa propre mère et son opposition avec celle-ci (il est possible qu’il ne soit pas question uniquement de sa mère, mais de marâtre, des formes de substitution maternelle, de grand-mères, de tantes, de voisines, de femmes proches d’elle dans sa jeunesse qui ont voulu avoir une emprise sur elle, en faire leur objet. Ce lien peut être réactivé au présent par des figures analogiques actuelles. En effet, ces profils sont souvent présents dans le monde du travail et il n’est pas rare de se retrouver sous la volonté d’emprise, positive ou négative, d’une aînée ou d’une supérieure hiérarchique).
Ce rêve de synchronicité exprime une terreur ancienne de l’araignée – certainement revivifiée par un déclencheur analogique actuel – ainsi qu’une crainte de lui ressembler avec le temps, d’être mangée par cette forme de la mère contrôlante ou dévorante. Ce pourrait être une tentation aussi. Le glissement sémantique sur le mot garage suggère une mise en garde contre les méfaits du passage du temps, du renforcement des névroses avec la prise d’âge. L’araignée géante correspondrait à l’anticipation d’une métamorphose arthropodienne kafkaïenne. Louise a été contaminée et veut se débarrasser de cette emprise psychique, une drôle de cuisine interne. Quand elle se rend dans la cuisine, désireuse de faire la lumière sur son passé, elle se confronte aussi à un futur ténébreux possible, une vision prolepse ; la forme psychique atavique pourrait se superposer à sa forme humaine si elle n’y prenait garde. Ça fait peur… Ce devenir serait en opposition avec sa nature féminine profonde, son évolution, son désir de conscience et toute l’intelligence humaine qui l’anime.
Alors, pourquoi la cuisine ? Ce lieu n’est pas anodin ; la cuisine est le lieu de la transformation des matières primitives, de l’alchimie interne, de l’assimilation des nourritures psychiques et de la métabolisation. Dans ce travail alchimique, Louise doit se purifier, se débarrasser du vil – les pollutions maternelles – pour accomplir sa métamorphose et atteindre le subtil, afin de ne pas se transformer en araignée. Cette dernière perspective donnerait aussi le cafard.
Dans un autre glissement sémantique nous pouvons entendre Q.I. dans le mot cuisine. Q.I. zine : fan de gros quotients intellectuels ? C’est possible. L’amatrice de gros QI serait en recherche de formes similaires à la sienne. Cette nature intrinsèque se devine et se révèle en elle par sa capacité à entrer en métaposition dans son rêve, à l’analyser in situ et à se distancier encore quand les belligérants s’appesantissent, quand ils sont lourdingues, soudain privés de légèreté par le manque de discernement. Donc, si Louise, reconnaît les gros QI, c’est qu’elle en possède un aussi, CQFD ! La sobriété du rêve, sa narration synthétique et sa concision sont les marques d’un esprit affiné et certainement d’une surdouance. Cette singularité s’entend aussi par le sentiment d’isolement de la narratrice, sa marginalisation, la propension à toujours se retirer ou à se faire rejeter, symptômes dont souffrent beaucoup de surdoués. L’enfant surdoué se sent différent et incompris, ce qui est normal puisque les autres n’ont pas l’intelligence nécessaire pour comprendre celle qui les dépasse. De plus, le surdoué intellectuel est aussi un surdoué sensitif, quelqu’un qui souffre d’une trop grande sensibilité, un hypersensible ce qui le rend vulnérable, trop émotif et parfois inadapté au monde et à ses codes spécieux. Percevant trop d’informations externes, de stimuli toxiques ou d’émotions polluantes, il peut ainsi se refermer dans sa bulle et ressentir un état de déréalisation, se sentir déconnecté du monde. Les occurrences sur les allées et venues seraient relatives à la propension de la rêveuse à entrer et sortir de la réalité, cette même réalité qui a pu être difficile autrefois.
La mise en scène du rêve et la posture analytique de la rêveuse, ainsi que son désengagement, peuvent nous guider vers cette hypothèse de la surdouance, donc du sentiment d’incompréhension dont elle pourrait souffrir, l’induisant à se carapacer et à se carapater. C’est encore kafkaïen. La problématique de l’intelligence (Louise) confrontée aux pulsions primitives (l’araignée) pourrait être aussi pertinente dans cette perception synchronistique.
Le contenu latent
Revenons donc à l’émission influente et à son contenu. Pendant l’écoute de l’émission complète, la rediffusion du 26 juin, hormis une bonne culture générale sur les processus neurologiques du rêve et l’étude de sa manifestation, j’ai été frustré de ne pas en apprendre davantage. Si l’invitée connaît bien sa partie, elle semble peu avertie, ni curieuse de la profondeur du rêve et de ses mécanismes psychologiques ; elle ne montre pas de recul, ni de capacité d’analyse pour ce phénomène. Bon, chacun son métier et sa vision. Si nous nous référons au contenu latent des propos de la neurologue pendant l’émission, manifestement le rêve se trouve tronqué et réduit à l’expression de borborygmes neuronaux, d’échos résiduels aléatoires de la réalité ou de réflexes miroir. Le rêve n’aurait aucune perspective de sens et de représentation symbolique. C’est bête… Néanmoins, il est possible que ce point de vue et ces études apportent de nouvelles compréhensions et pénétrations du rêve. Sait-on jamais ? Attendons… Et puis, pourquoi ne pas catégoriser et comptabiliser[7] les occurrences oniriques, à l’instar du businessman du Petit Prince, l’homme sérieux qui n’a pas le temps de rêvasser et qui compte les étoiles pour les posséder ?
Face à la réaction de ladite neurologue, on peut tout de même s’interroger sur son ton sarcastique et sur sa posture défensive relative à mon intervention et à ma spécialité, le langage du rêve. S’est-elle sentie menacée ? Ça n’aurait aucun sens ; je ne suis pas en rivalité avec elle ; mon domaine est spécifique, comme le sien. Pourquoi chercher la petite bête et se réfugier derrière la sacro-sainte institution de la Science, cette discipline qui exclut tout ce qui ne peut se mesurer par la reproduction exacte d’un phénomène ? Moult quidams qui se réclament de la Science et se retranchent derrière leur titre de scientifiques ne sont pas forcément ses meilleurs serviteurs. Historiquement, nous pouvons déplorer que cette discipline ait compté dans ses rangs beaucoup de besogneux réactionnaires, voire d’obscurantistes, voulant préserver leur pré carré en s’opposant au génie des visionnaires. Aujourd’hui, certains scientifiques peuvent se réfugier aussi dans un rôle de fonctionnaires planqués, serviteurs obséquieux dans l’obédience de leurs pères, impétrants impénétrants qui méritent le label pantoufle.
Le point de vue du scientifique, comme tout point de vue, est temporel et historique, pouvant être influencé subjectivement par des opinions, des prérogatives et l’espoir de s’approprier un domaine en y apposant son nom. Nombres de vérités scientifiques d’aujourd’hui seront certainement remises en cause par les découvertes ou les divergences de points de vue de nos enfants, tout autant que les vérités scientifiques d’hier sont remises en causes pour beaucoup par les découvertes actuelles. Ceci est aussi valable dans des disciplines qui ne sont pas considérées comme des sciences exactes, comme la psychanalyse.
Si la science mesure, théorise et codifie en formule les phénomènes qu’elle observe pour en faire des lois, elle n’explique pas ces processus – le magnétisme par exemple (les aimants) – mais les décrit. La science dit comment, mais pas pourquoi. Surtout, s’il est nécessaire de connaître les lois, c’est pour mieux sortir d’elles. Un phénomène peut se reproduire et être mesuré en laboratoire, certes, tout comme une névrose[8] se reproduit selon le même schéma… dont il faut sortir. La recherche du pourquoi et du sens permet aux chercheurs de tout poil de faire de nouvelles découvertes, mais, pour ce faire, il est nécessaire d’avoir une ouverture d’esprit qui puisse admettre ce que la science n’admet pas encore, d’être un peu irrationnel parfois : philosophe, rêveur ou psychologue. Il faut aller chercher du côté de la physique quantique pour avoir des approches du pourquoi ; mais de ce côté, on induit une notion de subjectivité dans l’approche scientifique ; l’observateur d’un phénomène s’inclut lui-même comme donnée dans l’expérience qu’il observe puisqu’il influe sur l’expérience et la modifie par son observation. Plus précisément encore, selon l’orientation du chercheur, il va voir se manifester le résultat qui dépend du point de vue auquel il adhère.
L’araignée pourrait-elle être une émanation de l’observatrice ou une projection d’un tiers ?
[7] La comptabilité n’est pas une orientation que j’ai prise, bien que les statistiques des occurrences du rêve fassent partie aussi de mon études du rêve ; l’écriture de mon dictionnaire est fondée (la base) sur le recensement des principaux symboles que nous rencontrons dans les rêves, même si cette sélection est partiale ; elle correspond à ma sensibilité et à l’écoute spécifique des rêves que l’on me soumet depuis de nombreuses années. Je m’attache aux éléments les plus signifiants parmi ceux que je rencontre, les plus fréquents et les plus symboliques.
[8] Le propre d’une névrose est d’être un phénomène psychique itératif et chronique, qui se reproduit selon le même schéma. La névrose agit souvent à l’insu du conscient de l’individu et vient altérer sa relation saine au monde. C’est un système qui empêche l’individu d’évoluer dans le sens de sa pulsion de vie harmonieuse et qui est une rejouance d’un schéma répétitif affectif de l’enfance, une mauvaise structure qui aura été installée par son environnement. La névrose est aussi génératrice de bénéfices secondaires et maintient ainsi l’individu dans le principe de plaisir qui s’oppose au principe de réalité. Elle fige dans une époque qui est une strate de la construction psychique.
Le contenu manifeste
La manifestation de l’araignée psychique est l’expression d’un sentiment d’imposture et d’impuissance que ressent au fond d’elle la femme devenue mère sans être devenue adulte. Pour celle qui apparaît comme une araignée, la cause serait une névrose installée très tôt, relative à sa place d’enfant, une affection la maintenant dans le sentiment de ne pas avoir été vue et entendue. Il en résulte un fond d’illégitimité et un sentiment d’injustice qui la poussent à sur-revendiquer son statut et sa place. Ainsi, à la moindre contrariété, la mère-douceur-et-sourires peut passer à une forme radicalement opposée. Mise en défaut, la mère araignée va alors vociférer et agonir, faisant montre d’une redoutable puissance de feu ou, au contraire, jouer les victimes éplorées, celle qu’on redoute de contrarier. De façon générale, elle cherche à se faire entendre et à occuper toutes les places en contrôlant tout et en imposant son désir par la toute-puissance infantile déguisée en matriarcat[9]. Cette dominance peut prendre différentes formes : amour tyrannique, sacrifice, victimisation, ingérence ou autoritarisme sévère. La mère araignée souffre aussi d’un complexe de castration qui se réactive dans certaines situations, notamment dans la compétition ou la substitution à l’homme ; elle devient alors une mère phallique. Il s’agit encore de la rejouance de sa propre enfance, d’avoir été éloignée du père ou d’avoir été défavorisée en tant qu’élément féminin, parfois face à un frère. Très souvent, il y a eu un manque d’accompagnement et de transmission, une grande frustration. Cet atavisme est fréquemment transmis par une lignée de matriarches, des femmes qui se sont retrouvées dans un paradoxe n’ayant pas eu le droit d’avoir de places tout en ayant été contraintes de se substituer à l’homme.
Manifestement, la mère araignée cherche à dominer et à manipuler son entourage par la forme tyrannique, embrouillante et culpabilisante, activant les structures d’assujettissement ou de culpabilité paralysante présentes au fond de nous. Nous avons tous, plus ou moins, des structures d’obédience introjectées et vouées à la matrice dont nous sommes issus. Celles-ci sont d’autant plus fortes que la mère qui se sent illégitime peut s’adresser à l’enfant durement et sans explication, donnant des ordres intransigeants et arbitraires qui viennent stimuler les structures d’accueil de la peur ou de la culpabilité. Or, cette expression accablante est celle d’un malaise intérieur et d’une inertie pesante chez cette forme de mère. La lourdeur et l’absence à soi-même induisent souvent une dépression. Le fond dépressif est latent chez la mère infantile, masqué par sa toute-puissance, mais contagieux quand même.
N’ayant pas développé son Moi, la mère araignée demeure un gros bébé dévorant qui manipule émotionnellement son entourage pour compenser sa frustration. Le Ça impose alors sa bête tyrannie, superfétatoire et aléatoire.
[9] La toute-puissance: chez l’enfant, le sentiment d’impuissance devant certaines situations qu’il ne peut pas gérer peut induire sa contrepartie, la toute-puissance infantile. C’est une revanche fantasmée sur le réel qui lui échappe, sur le monde que l’enfant subit parfois et qu’il ne peut pas contrôler. Si l’enfant n’avait pas cette capacité à dominer le monde par l’imaginaire, il aurait un sentiment d’écrasement et pourrait s’effondrer sur lui-même. Naturellement ; les jouets ou les fantasmes sont des supports pour lui de cette dimension où il peut dominer le monde, le contrôler ; cette phase où il s’autorise une expansion peut ensuite le mener à la véritable puissance. Si cette phase n’a pas pu bien se réaliser – non écoute permanente du désir de la petite fille ou du petit garçon, obéissance totale, rejet, objectification, sentiment de déni de sa place, parentalisation –, plus tard, il va subsister chez l’individu une propension à vivre dans le contrôle, la résistance ou l’usurpation sans vergogne. Ainsi, la mère infantile qui se sent menacée, peut agir de façon péremptoire, juger un domaine qu’elle ne connaît pas, affirmer des contrevérités sidérantes et confusionnantes laissant cois ses auditeurs qui n’osent la contrarier, par crainte de son instabilité d’humeur et de représailles, par honte pour elle, par pitié ou par assujettissement. C’est la toute-puissance de la mère araignée, celle qui s’identifie à la grande tisseuse cosmique, la mère de tout. Plus nous sommes face à une mère autoritariste, caractérielle, inique, anarchique, instable ou phallique, plus nous sommes face à un profil infantile. La toute-puissance maternelle est une perversion-prolongement de la toute-puissance infantile. C’est ce que je nomme le profil de la reine rouge.
L’araigneurologue
Est-il possible que notre rêveuse connectée ait senti cette structure primitive psychique chez la femme qui rabaisse le psy, le substitut paternel de Louise ? Si c’est le cas, cette énergie conflictuelle serait entrée alors en résonance avec sa sensibilité, causant le réveil d’une affliction ancienne, celle de sa problématique d’enfance ; son lien avec sa mère-araignée. Hypersensible, elle aurait développée une réceptivité particulièrement vive à ce type de personnalité à l’intelligence différente et toxique pour elle. Malgré elle, Louise peut se connecter avec des éléments exogènes à sa sphère intime, mais résonants et signifiants pour elle. Le thérapeute représenté serait donc bien le substitut paternel, celui qui aurait été l’objet d’un transfert et le catalyseur d’affects anciens et intenses, révélant la mère nuisible.
Si nous revenons à notre invitée, il est bien évident qu’elle n’est pas cette forme caricaturale, que nous ne sommes pas en présence d’une neuneurologue et que l’aspect araignée n’est pas la partie dominante de sa personnalité. Cet aspect serait seulement saillant dans certaines situations, notamment si un intrus vient s’immiscer dans son domaine et lui gâcher son heure d’apothéose radiophonique en délivrant des balivernes sur les bébêtes oniriques, en assénant ses interprétations comme des vérités premières et en voulant transformer sa scène privée en bébête show. La grosse tête chercheuse a voulu rendre à l’araignée ses lettres de noblesse, ses étoiles et sa toile, son rang. Ainsi, en aucun cas nous ne pouvons penser qu’elle se serait sentie visée, ni reconnue…
Louise a l’ouïe sensible
Par le rêve, Louise fait se rencontrer et échanger les substituts parentaux dans un fantasme onirique et névrotique. Elle les met face à face, ici et maintenant – alors qu’ils ne se sont pas rencontrés physiquement, mais seulement chronologiquement et spatialement par la magie des ondes – pour leur faire rejouer le conflit mortifère de ses parents qui l’a évincée. Pas d’escarmouche, ni question de prendre la mouche (pour nourrir l’araignée) ! Nous n’entrerons pas dans cette polémique ni dans cette discussion un peu lourde pour rester au diapason détaché de notre héroïne arachnophobe, mais néanmoins débusqueuse d’araignées, ces angoissées-contrôlantes qui sont partout, qui tissent des liens partout, qui grouillent partout et qui s’infiltrent partout, dans nos rêves, sur les ondes et dans la synchronicité, partout, partout…
Le rêve reste un domaine encore magique, une terra incognita pouvant attirer les derniers explorateurs de dimensions mystérieuses en quête d’énigmes à résoudre et de réponses extraordinaires. C’est un gisement aurifère, une promesse d’Eldorado, la face cachée de la Lune. Certains sont animés du désir de révéler ses pépites quand pour d’autres, c’est un désir de posséder, d’y planter leur bannière égotique en toute tranquillité. Il serait malséant d’appréhender le rêve et de le pénétrer dans une bête imposture, une attitude de rebelle Tartuffe.